Les nouvelles encourageantes concernant la mise au point de vaccins contre la COVID-19 ont suscité l’optimisme des investisseurs. Ainsi, nombreux sont ceux qui ont commencé à se demander à quoi pourrait ressembler un monde post-COVID-19. Nous avons rencontré Marcello Montanari, vice-président et premier gestionnaire de portefeuille, Actions nord-américaines, et Rob Cavallo, gestionnaire de portefeuille, Actions nord-américaines, pour discuter des avancées récentes sur le plan des vaccins, des préoccupations entourant les valorisations et des tendances dans les secteurs de la technologie et des soins de santé.
Quelles sont vos prévisions quant à la stratégie de vaccination contre la COVID-19 et au moment où elle sera déployée ?
Pfizer et Moderna ont annoncé des résultats très intéressants concernant leur vaccin contre la COVID-19. Il y aurait donc enfin une lumière au bout du tunnel. Les prochaines étapes comprendront une réunion de la FDA, au début de décembre, où il sera question du vaccin de Pfizer et possiblement aussi de celui de Moderna. Celle-ci pourrait donner lieu à l’autorisation d’utilisation d’urgence des vaccins aux États-Unis d’ici la fin de 2020, et par la suite au Canada.
Selon nous, les travailleurs de la santé et les personnes présentant un risque élevé pourraient bien être vaccinés au premier trimestre de 2021. Les données relatives à l’innocuité sur six mois devraient paraître vers mars, et les deux vaccins sont susceptibles d’obtenir une approbation complète d’ici avril 2021. Quand les vaccins seront disponibles, tous les yeux se tourneront vers la capacité de distribution. Bien que cela semble simple, en plus de devoir produire les vaccins en masse, il faudra les répartir adéquatement entre les différentes administrations de soins de santé. Une réflexion approfondie s’impose quant à l’évitement des goulets d’étranglement et à l’efficacité de la vaccination.
Bon nombre de prévisions optimistes laissent entendre que les États-Unis pourraient être en mesure de vacciner tous les volontaires d’ici le milieu de l’année prochaine. Étant de nature plus prudente, nous préférons avancer qu’il est probable que cela se réalise d’ici le début de l’automne 2021. Le Canada devra inévitablement attendre un peu. Toutefois, nous sommes convaincus que la conjoncture se normalisera d’ici 12 mois, mais que certaines mesures de prévention demeureront, notamment la distanciation sociale et le port du couvre-visage.
En quoi le secteur de la technologie d’aujourd’hui diffère-t-il de ce qu’il était en 2000 ?
Il y a, d’après nous, de nombreuses différences entre ce qui s’est produit en 2000 et ce qui se passe aujourd’hui. Cela ne veut pas dire que les titres technologiques ne pourraient pas connaître une certaine contre-performance advenant une ruée sur des secteurs plus cycliques du marché. Nous sommes toutefois très optimistes à l’égard des occasions à long terme dans un contexte plus normalisé.
La bulle technologique de 2000 a été provoquée par des niveaux d’euphorie que nous n’avons pas vraiment revus au cours de la période qui a suivi. En 2000, nous n’étions qu’aux balbutiements de l’économie numérique. Les investisseurs ont commencé à anticiper une possibilité qui ne se concrétiserait pas avant plusieurs années et, à mesure que les cours des actions du secteur augmentaient, on s’est mis à employer des mesures de valorisation extrêmes, comme le prix par utilisateur, le prix par ingénieur, etc.
De plus, le marché des PAPE était en plein essor, et pratiquement chaque émission doublait de valeur dès le premier jour. La période actuelle est bien différente. Certes, il y a vraisemblablement des sociétés technologiques à forte croissance qui sont surévaluées, mais nous croyons qu’en règle générale, les cours du secteur ne sont pas déraisonnables. L’écosystème actuel est beaucoup plus développé. D’ailleurs, les entreprises faisant leur introduction en bourse aujourd’hui présentent des modèles d’affaires plus avancés et représentatifs. Or, ce n’était pas le cas à l’époque de la débâcle technologique.
Quels types de nouvelles tendances voyez-vous émerger en raison de la pandémie de COVID-19 ?
La COVID-19 a vraiment accéléré de nombreuses tendances importantes, en particulier en ce qui a trait au commerce électronique. Nous sommes d’avis que beaucoup de nouveaux comportements ont été intériorisés, de sorte que la plupart de ces tendances se poursuivront même après la pandémie, bien qu’une certaine période de consolidation risque d’être nécessaire.
Par exemple, nous nous attendons à une certaine reprise du magasinage traditionnel, mais au cours des derniers mois, un nouvel ensemble de personnes susceptibles de ne pas revenir complètement en arrière a découvert le commerce en ligne.
Les réunions virtuelles sont également là pour de bon, selon nous. Cependant, elles seront sans doute moins fréquentes que durant le pic de la pandémie. Les salles de sport à domicile et le conditionnement physique virtuel sont probablement des domaines où les chances de revenir aux anciennes normes sont les plus élevées. La télésanté représente une autre réalité assez jeune, mais qui devrait continuer de prendre de l’ampleur après la COVID-19.
Quelles sont vos prévisions pour les actions technologiques de sociétés à mégacapitalisation ?
Les sociétés à mégacapitalisation sont exceptionnellement bien placées et bénéficient de solides avantages séculaires. Nous estimons que la valorisation de la majorité des titres peut être justifiée à moyen terme. La plupart des sociétés à mégacapitalisation peuvent faire valoir leur exposition future à l’intelligence artificielle, une source d’options pour les domaines de croissance.
Prenons l’exemple d’une société en particulier : Google. Cette dernière se démarque et vient de commencer à afficher un rendement supérieur. Dans un monde où toute forme de commerce dépend de plus en plus du numérique, Google est en excellente position. De plus, elle tirera parti de la reprise éventuelle des voyages (avec Google Flights et Google Travel), ce qui lui confère une exposition cyclique.
L’un des secrets pour comprendre la trajectoire de Google, c’est d’analyser le comportement non linéaire de la tarification d’AdWord, à mesure que la concurrence entourant les mots-clés s’intensifie. Google et Facebook sont des chefs de file en matière de données de source primaire, ce qui est essentiel pour l’intelligence artificielle.
Quels obstacles les secteurs de la technologie et des soins de santé pourraient-ils avoir à surmonter advenant un prolongement des mesures réglementaires ?
Compte tenu des résultats de l’élection présidentielle américaine, certains risques réglementaires pour les actions du secteur de la technologie sont susceptibles de s’atténuer. La division au sein du Congrès rendra probablement difficile l’adoption de mesures importantes contre l’industrie. Nous doutons néanmoins que la rhétorique disparaisse, car il ne s’agit pas d’une question totalement partisane.
Du point de vue de la réglementation, les résultats de l’élection (en supposant que le deuxième tour en Géorgie ne fasse pas basculer le Sénat) sont également favorables aux titres du secteur des soins de santé.
Certains enjeux bipartisans pourraient encore être soulevés, comme les coûts des médicaments à la charge des patients, mais un changement substantiel semble peu probable. Cela dit, un risque persiste autour de l’Obamacare, au sujet de laquelle nous attendons une nouvelle décision de la Cour suprême au printemps.
Les relations entre les États-Unis et la Chine constituent un autre sujet chaud. Par contre, nous croyons que la nouvelle administration adoptera une approche plus pragmatique. Cela permettra aux entreprises de prendre des décisions plus éclairées en ce qui concerne la chaîne logistique et contribuera donc à réduire la volatilité observée ces dernières années.
Que pensez-vous de la nouvelle puce M1 d’Apple ?
Nous pensons qu’il y a de nombreuses considérations stratégiques importantes à long terme découlant de cette annonce. Notre réflexion à cet égard se poursuit, mais voici certaines des conclusions auxquelles nous sommes arrivés :
- Il s’agit d’un grand bond en avant pour Apple, car à première vue, la puce M1 semble être nettement meilleure que tout autre produit sur le marché.
- Elle pourrait permettre à Apple d’élargir considérablement la part de marché du Mac, l’entreprise transférant une partie des économies aux consommateurs, en plus de proposer un ordinateur au rendement supérieur.
- Cela ouvre aussi la voie à une plus grande interfonctionnalité entre le Mac et d’autres appareils Apple. Les occasions de renforcer son écosystème ne manquent pas pour Apple.
- En contrepartie, Intel encaisse un nouveau coup, perdant une bonne part de son chiffre d’affaires. Il s’agit également d’une validation de l’architecture ARM pour les PC, ce qui place Intel à risque de perdre d’autres clients au fil du temps. Nous ne voulons pas faire de projections directes en ce qui a trait à d’autres marchés, comme celui des centres de données. Nous estimons toutefois que la validation d’un système basé sur ARM pour des appareils autres que mobiles offre de nouvelles possibilités, surtout si Nvidia parvient à obtenir les approbations réglementaires nécessaires pour acquérir la technologie ARM.
Pour en savoir plus sur l’équipe Actions nord-américaines RBC.