Les changements climatiques ont déjà des répercussions sur les habitants, les écosystèmes, les économies et les marchés des capitaux de la planète, et ils continueront de poser une menace importante, à moins qu’une intervention efficace se produise. Celle-ci pourrait ralentir, voire annuler, les effets des changements climatiques, mais il faudrait pour ce faire déployer de vastes efforts concertés afin de réduire les émissions anthropiques de gaz à effet de serre.
Le climat est en train de changer
En règle générale, les sociétés et les investisseurs considèrent les changements climatiques et les enjeux connexes comme des risques aussi éloignés dans le temps que les prévisions à long terme de la plupart des politiques sur les changements climatiques. Ainsi, le dernier rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de l’Organisation des Nations Unies (ONU) indique la voie à suivre pour ramener les émissions nettes à zéro d’ici le milieu du siècle.1 Même si les incidences des changements climatiques devraient s’intensifier avec le temps, nous avons déjà commencé à constater des effets importants. En somme, les incidences des changements climatiques sur les marchés des capitaux varieront considérablement selon les catégories d’actif et l’horizon de placement, mais ils pourront poser des risques importants pour les investisseurs à court terme. RBC Gestion mondiale d’actifs Inc. (RBC GMA) croit que l’intégration des questions environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) dans son processus de placement permet d’améliorer le rendement à long terme de ses placements.
Par exemple, de plus en plus de données indiquent que les changements climatiques augmentent l’intensité des conditions météorologiques naturelles et entraînent une hausse des températures. La survenance d’épisodes de grande variabilité du temps et la hausse des températures s’accompagnent d’une augmentation du risque de perte lié aux actifs corporels. En tenant compte de la portée et de l’emplacement des activités d’une société, les investisseurs peuvent déterminer si ses actifs corporels et ses infrastructures sont vulnérables à des conditions météorologiques instables à court terme, comme des ouragans, des sécheresses prolongées et des vagues de chaleur extrême.Faillite de PG&E
Au cours de 2017 et de 2018, des feux incontrôlés ont dévasté de vastes pans de la Californie. Le feu appelé « Camp Fire », qui a éclaté en novembre 2018, s’est révélé le plus meurtrier et le plus catastrophique de l’histoire de l’État : il a causé plus de 85 décès, détruit 14 000 foyers, ravagé un territoire de la superficie de Chicago et occasionné des dommages d’environ 7 milliards de dollars américains.2 En conséquence, la Pacific Gas and Electric Corporation (PG&E), première société de services publics en importance de la Californie, fait maintenant l’objet de centaines de poursuites pour négligence, ainsi que pour violations du code de la santé et de la sécurité, totalisant environ 30 milliards de dollars américains.
En janvier 2019, PG&E s’est placée à l’abri de ses créanciers en vertu du chapitre 11 de la loi sur les faillites des États-Unis. Le titre de la société a chuté de 90 % depuis ses sommets records de septembre 2017, et celle-ci a vu sa cote de solvabilité passer de la catégorie investissement à la catégorie spéculative. Comme sa couverture d’assurance est de moins de 2 milliards de dollars américains et qu’aucun programme national d’indemnisation des dommages causés par les feux incontrôlés n’existe, PG&E devra fort probablement financer ses obligations de 30 milliards de dollars américains au moyen d’une restructuration de dettes en vertu du chapitre 11.3,4
Les changements climatiques ont joué un rôle important dans la catastrophe en créant des conditions propices à la récurrence de feux incontrôlés. Au cours de l’été 2018, les températures ont été nettement plus élevées que la moyenne en Californie5 et les précipitations y ont été inférieures à la moyenne6, de sorte que la saison estivale a figuré parmi les plus sèches qui y aient jamais été enregistrées. Conjuguées à la négligence présumée de PG&E7, ces conditions météorologiques ont entraîné l’un des feux incontrôlés les plus destructeurs de l’histoire de la Californie.8
Un examen plus attentif de PG&E met en évidence certains faits. Premièrement, le recours au chapitre 11 n’est pas une première pour PG&E : elle a secoué les marchés financiers en s’engageant dans cette voie en avril 2001. Aucune autre société de services publics d’une aussi grande taille ne s’était mise auparavant à l’abri de ses créanciers.9 Deuxièmement, le Camp Fire n’est pas le premier feu incontrôlé auquel la négligence présumée de la société a créé un terreau favorable10 : PG&E a joué un rôle dans d’autres grands feux incontrôlés plusieurs années auparavant. En 2017, par exemple, elle a été mise en cause dans l’éclatement de trois feux incontrôlés en Californie.11
La responsabilité que pourrait encourir PG&E à la suite de la catastrophe fait ressortir l’importance pour les investisseurs et les sociétés d’être conscients des risques ESG considérables auxquels les entreprises sont exposées et de la nécessité de bien les gérer.
Intégration des risques et des occasions engendrés par les changements climatiques dans l’information financière
De plus en plus, les participants aux marchés exigent que de l’information leur soit fournie relativement aux incidences potentielles des changements climatiques sur les actifs des sociétés et sur la mise en oeuvre de leur stratégie, de leurs activités et de leur financement. Cette information porte notamment sur les répercussions concrètes que pourraient entraîner les changements climatiques, comme l’intensification du stress hydrique, des vagues de chaleur et des événements météorologiques extrêmes (inondations, ouragans, etc.). En juin 2017, les appels à la transparence de plus en plus pressants ont trouvé un écho dans les recommandations du Groupe de travail sur l’information financière relative aux changements climatiques (GIFCC) du Conseil de stabilité financière, qui prône l’intégration de renseignements sur les risques et les occasions engendrés par les changements climatiques dans les rapports et l’information financière des sociétés.
Les recommandations du GIFCC visaient à favoriser l’harmonisation de la panoplie de régimes, de cadres et d’initiatives touchant l’information en vigueur, notamment ceux qui ont trait à la publication d’information financière et non financière. Deux organismes comptant parmi ceux dont il est le plus abondamment question dans les recommandations du GIFCC, soit le Climate Disclosure Standards Board (CDSB) et le Sustainability Accounting Standards Board (SASB), ont déjà adopté sa position.
Il arrive souvent que l’information actuellement fournie par les sociétés et les pays ne soit pas assez complète pour que les investisseurs puissent parfaitement comprendre et évaluer les risques et les occasions engendrés par les changements climatiques. Dans ce contexte, RBC GMA se réjouit des efforts du GIFCC, car elle est d’avis qu’ils aident les sociétés à communiquer aux investisseurs de l’information cohérente et utile relativement aux changements climatiques de façon comparable, peu importe le secteur d’activité ou le pays.
À titre d’investisseur à long terme favorisant le dialogue, RBC GMA encourage les sociétés dans lesquelles elle investit à étoffer l’information publiée en cette matière. Les éléments d’information à fournir varient selon les sociétés et les catégories d’actif, mais ils apportent souvent des précisions sur la façon dont le conseil surveille les questions liées aux changements climatiques et sur l’établissement d’objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre à long terme. RBC GMA peut aussi recommander aux sociétés dans lesquelles elle investit de remplir le questionnaire du CDP (auparavant Carbon Disclosure Project)12 , qui répond à une bonne partie des recommandations du GIFCC.
Stratégie de RBC GMA en matière de changements climatiques
RBC GMA sait que les changements climatiques comptent parmi les questions les plus urgentes du moment et qu’ils touchent la quasi-totalité des secteurs d’activité. Selon de nombreuses preuves scientifiques, les changements climatiques résultent d’activités humaines, notamment la combustion d’énergies fossiles ainsi que la déforestation et d’autres changements d’utilisation du sol, comme il en est question dans le rapport spécial susmentionné du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat de l’ONU. C’est pourquoi RBC GMA a, en 2018, mis à jour son document La démarche en matière d’investissement responsable pour souligner l’importance accordée aux risques et aux occasions de placement engendrés par les changements climatiques dans la poursuite de ses efforts d’intégration des critères ESG.
Comme l’illustre le cas de PG&E, les investisseurs sont déjà vulnérables aux risques liés aux changements climatiques. Par conséquent, ils devraient non seulement s’arrêter aux risques à long terme, mais aussi tenir compte des risques et des occasions engendrés par les changements climatiques présents sur toute la durée de l’horizon de placement. RBC GMA pense qu’en adoptant une approche réfléchie et en intégrant un large éventail de facteurs liés aux changements climatiques dans le processus de placement, elle est mieux placée pour évaluer l’exposition des sociétés à ces facteurs, ainsi que leur connaissance et leur gestion des questions qui s’y rapportent.
Le récent document La gérance à l’oeuvre – Rapport annuel 2018 sur, présente l’approche de RBC GMA quant aux votes sur les propositions relatives aux changements climatiques et les modifications qui ont été apportées à ses Directives de vote par procuration à cet égard.