À la suite de la reprise impressionnante après les creux de la pandémie, la période de croissance mondiale achève désormais et le risque de récession est élevé. Les indicateurs économiques avancés ont fortement chuté après avoir culminé entre la fin de 2020 et le début de 2021, la confiance des consommateurs s’est effondrée et les entreprises ont réduit leurs plans d’embauche ainsi que leurs dépenses en immobilisations. Bien que la situation puisse s’améliorer, les perspectives demeurent grandement incertaines en raison de la guerre actuelle en Ukraine, de la crise énergétique qui en découle en Europe, des défis restants liés à la COVID-19, de l’inflation insoutenable et du resserrement énergique de la part des banques centrales. Les prévisions de croissance ont progressivement été revues à la baisse tout au long de l’année. Selon nous, si une récession survient, elle frappera probablement vers la fin de 2022 ou le début de 2023 (figure 1).
Figure 1 : PIB réel moyen pondéré selon les prévisions générales
Estimations de croissance des principaux pays développés
Nota : En date d’août 2022. Source : Consensus Economics
L’inflation est problématique, mais elle montre des signes de plafonnement
Les prix à la consommation n’ont jamais grimpé aussi rapidement en 40 ans. L’inflation constitue vraisemblablement la plus grande menace pour la croissance, mais de nombreux facteurs à l’origine de la flambée des prix semblent enfin s’estomper. Depuis le printemps, la demande de pétrole et d’autres marchandises a beaucoup diminué, ce qui a fait chuter leur prix. Les coûts d’emprunt ont monté en flèche, les mesures de stimulation budgétaire ont diminué et les problèmes d’approvisionnement sont en voie d’être résolus. Aux États-Unis, l’inflation globale est passée d’un pic de 9,1 % en juin à 8,5 % en juillet. Bien qu’il reste encore beaucoup de chemin à faire et qu’il s’annonce cahoteux, l’inflation pourrait tomber à 3,5 % d’ici la fin de 2023 (figure 2).
Figure 2 : Hausse des prix à la consommation aux États-Unis
IPC (variation annuelle en %)
Nota : Données de l’IPC au 31 juillet 2022,. prévision au 31 août 2022. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Les banques centrales doivent avoir de meilleures preuves que l’inflation est maîtrisée avant de freiner leurs efforts
Afin de maintenir leur crédibilité acquise au cours des dernières décennies, les banques centrales doivent avoir la certitude que l’inflation est à la baisse et que le risque de stagflation (une inflation élevée accompagnée d’une croissance stagnante) est écarté avant de relâcher la pédale. Le cycle de resserrement actuel est marqué par des hausses massives de taux d’intérêt en succession rapide, et d’autres hausses sont prévues dans l’ensemble des pays développés. Depuis le mois de mars, la Réserve fédérale américaine (Fed) a relevé les taux d’intérêt à court terme de 225 points de base. Sur le marché des contrats à terme, on s’attend à d’autres hausses totalisant 150 points de base d’ici le début de 2023. Le sommet du cycle actuel serait ainsi de près de 4,0 % (figure 3). Bien que les prix des contrats à terme laissent envisager des baisses de taux en 2023, le discours prononcé par Jerome Powell à Jackson Hole le 26 août confirme que les taux d’intérêt devraient rester élevés jusqu’à ce que la menace d’inflation soit complètement éliminée, même si l’économie doit en souffrir. Vu la vigueur du marché du travail, la Fed peut continuer à faire preuve de fermeté pour le moment.
Figure 3 : Taux des fonds fédéraux et attentes implicites
Contrats à terme sur 12 mois
Nota : Au 26 août 2022. Source : RBC GMA
Les taux obligataires continuent d’augmenter, et le risque d’évaluation, de diminuer
Dans le contexte actuel, les marchés des titres à revenu fixe ont affiché un degré important de volatilité et les obligations ont fait l’objet de leur pire liquidation depuis le début des années 1980. Le taux des obligations américaines à dix ans a grimpé jusqu’à 3,5 % au début du trimestre, alors qu’il se situait à 1,5 % au début de l’année (figure 4). Par conséquent, le risque d’évaluation a considérablement baissé. Sans grande surprise, nos modèles indiquent que si nous avons tort et que l’inflation demeure élevée, les taux obligataires continueront leur ascension. Cependant, si la récente poussée inflationniste s’avère temporaire, ils se situent vraisemblablement près des niveaux que nous prévoyons à moyen et à long terme.
Figure 4 : Taux des obligations du Trésor américain à dix ans
Fourchette d’équilibre
Nota : Au 26 août 2022. Source : RBC GMA
Les valorisations boursières subissent les pressions exercées par la hausse des taux d’intérêt et l’inflation
Au cours du premier semestre, les actions mondiales ont basculé en territoire baissier dans un contexte d’intensification des craintes liées à la hausse des taux et à l’inflation. L’indice S&P 500 a cédé pas moins de 23,5 % par rapport à son sommet historique avant de regagner la moitié de cette perte à la mi-août, alors que l’inflation montrait des signes de plafonnement. La majorité des fluctuations des marchés boursiers depuis le début de l’année s’explique par l’évolution des valorisations causée par les relèvements des taux d’intérêt et la perte de confiance des investisseurs, qui ont particulièrement touché les actions des sociétés technologiques à forte croissance. L’indice S&P 500 se trouve à un niveau légèrement supérieur à sa juste valeur estimée par nos modèles. Bien des scénarios sont possibles, mais ceux dont les résultats sont les plus positifs pour les actions reposent sur le maintien des bénéfices des sociétés ainsi que sur le plafonnement de l’inflation et des taux d’intérêt (figure 5).
Figure 5 : Point d’équilibre de l’indice S&P 500
Bénéfices et valorisations normalisés
Source : RBC GMA
Les perspectives de bénéfices sont mises à mal par le risque de récession
Même si les marchés financiers ont été volatils, les perspectives de bénéfices sont relativement demeurées les mêmes. Les sociétés ont utilisé leur pouvoir de fixation des prix pour accroître leurs revenus malgré la montée des coûts. Elles ont donc maintenu leurs marges et amélioré leurs bénéfices. Bien que les estimations soient maintenant légèrement revues à la baisse, les analystes prévoient toujours une croissance des bénéfices de 8 % pour les sociétés de l’indice S&P 500 en 2022 et de 8 % en 2023 (figure 6). Selon nous, ces estimations sont optimistes puisque les bénéfices ont diminué en moyenne de 25 % en période de récession. Si l’économie se dirige actuellement vers une récession, les bénéfices risquent d’être beaucoup plus faibles que prévu, ce qui pourrait entraîner un recul plus important des marchés boursiers.
Figure 6 : Indice S&P 500
Estimations générales des bénéfices
Nota : Au 31 août 2022. Sources : Thomson Reuters, Bloomberg
Répartition de l’actif – Vers le point neutre
Compte tenu de l’équilibre entre les risques et les occasions, notre répartition de l’actif est plus proche du point neutre qu’elle ne l’a été depuis quelque temps. Elle reflète notre avis selon lequel les perspectives sont inhabituellement incertaines et que l’éventail des résultats possibles est très large, car les banques centrales ont pour unique objectif d’endiguer l’inflation, même si leurs mesures musclées de resserrement monétaire nuisent à la croissance économique. Selon nous, les marchés obligataires ont déjà pris en compte une bonne partie du resserrement prévu des banques centrales. La hausse des taux s’est atténuée sur les marchés des titres à revenu fixe. Les obligations fournissent désormais un meilleur contrepoids aux actions en cas de repli. Au cours des derniers mois, nous avons donc réduit davantage notre sous-pondération en obligations compte tenu de la hausse des taux, en puisant dans les liquidités et les actions. À long terme, nous croyons toujours que les actions offriront un rendement supérieur à celui des obligations. C’est pourquoi nous maintenons une légère surpondération en actions, mais celle-ci est beaucoup plus faible que ce qu’elle était au cours de périodes précédentes du cycle actuel. Nous continuerons à faire preuve de prudence à court terme en raison du risque de récession. Avant d’augmenter l’exposition au risque, nous préférons attendre que d’autres signes montrent que l’inflation se rapproche de la cible de 2 % de la Fed ou que les prévisions des bénéfices reflètent des perspectives plus prudentes que celles qui sont actuellement prises en compte. Nos recommandations actuelles de répartition de l’actif pour un portefeuille mondial équilibré sont les suivantes : 61,5 % en actions (pondération stratégique neutre de 60 %), 37,5 % en obligations (pondération stratégique neutre de 38 %) et 1,0 % en liquidités (figure 7).
Figure 7 : Composition d’actifs recommandée
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