Regard sur les placements mondiaux
Notre dernier Regard sur les placements mondiaux trimestriel (en anglais seulement) a été publié. Il nous fournit une vaste évaluation des conditions des marchés financiers et de la trajectoire future.
En anglais seulement : L’article économique est intitulé « Consumer revival awakens inflation fears » (la reprise de la consommation réveille les craintes d’inflation).
Aperçu
Dans le billet de cette semaine, nous traitons des dernières données sur les infections, de la réouverture, des chiffres relatifs à la vaccination et des détails concernant le variant Delta. De plus, nous vous présentons nos plus récentes prévisions économiques et nous examinons les principales tendances, notamment la dégradation de l’humeur de l’actualité et la remontée du taux d’occupation dans les hôtels. Nous disséquons ensuite les dernières missives de la Fed, puis fournissons une mise à jour sur l’inflation et une nouvelle perspective sur les thèmes post-pandémiques.
Les récents développements demeurent un mélange de points positifs et négatifs.
Points négatifs
- Le variant Delta continue de faire grimper les chiffres au Royaume-Uni. Il gagne aussi du terrain discrètement dans d’autres pays, dont le Canada.
- Dans les marchés émergents, le nombre de nouvelles infections ne baisse plus aussi rapidement qu’auparavant, et certains pays enregistrent même une hausse.
- Aux États-Unis, les dernières données sur l’inflation ont encore dépassé les attentes.
- Nos projections de croissance économique révisées ne sont plus tellement supérieures aux prévisions générales.
En revanche, voici quelques points positifs :
- Le nombre d’infections à l’échelle mondiale continue de diminuer, surtout dans les pays développés.
- Bien que le variant Delta soit plus contagieux, dommageable et résistant aux vaccins, il semble que même une seule dose de vaccin réduise considérablement la probabilité d’un cas grave nécessitant une hospitalisation.
- La Fed a durci le ton. Cela pourrait être interprété comme un point négatif, dans la mesure où les actifs à risque se portent généralement mieux dans un contexte de faibles taux d’intérêt. Cependant, il est encore plus important que les banques centrales ne commettent pas d’erreur stratégique, soit dans le cas présent, de laisser les taux trop bas alors même que l’inflation augmente et que la relance économique progresse.
- Plus particulièrement dans les pays développés, on poursuit l’assouplissement des restrictions et les économies s’accélèrent.
Ralentissement de l’amélioration relative à la progression des infections
Le nombre quotidien de nouvelles infections à la COVID-19 continue de diminuer dans le monde (voir le graphique suivant). Cependant, le taux d’amélioration a récemment ralenti, ce qui pourrait s’expliquer par la propagation du variant Delta, initialement repéré en Inde.
Cas de COVID-19 et décès causés par la COVID-19 dans le monde
Au 20 juin 2021. Moyennes mobiles sur sept jours du nombre quotidien de nouveaux cas et de décès. Sources : Organisation mondiale de la Santé (OMS), Macrobond, RBC GMA
La décélération est particulièrement manifeste dans les pays émergents (voir le graphique suivant). Cela est sans doute logique, étant donné que ces pays ont reçu moins de vaccins par habitant. Un bon nombre de pays émergents présentent des taux élevés et/ou en hausse du nombre quotidien de nouvelles infections, notamment en Amérique du Sud (Colombie, Brésil, Chili et Pérou). Ailleurs dans le monde, on observe également une augmentation en Afrique du Sud et en Russie.
Nombre de cas de COVID-19 dans les pays émergents et dans les pays développés
Au 20 juin 2021. Moyennes mobiles sur sept jours du nombre quotidien d’infections. Sources : OMS, Macrobond, RBC GMA
Alors que la Chine enregistrait récemment son taux d’infection le plus élevé depuis le début de 2020, elle semble maintenant avoir repris les choses en main. Nous avons une grande confiance dans sa capacité à maîtriser la pandémie. Le taux d’infection recule aussi en Europe.
Heureusement, la baisse du nombre de cas se poursuit aux États-Unis, même si le pays impose des règles de distanciation sociale parmi les moins strictes et que son avantage en matière de vaccination diminue (voir le graphique suivant). Les États-Unis enregistrent maintenant le plus petit nombre de nouvelles infections depuis le début de la pandémie.
Cas de COVID-19 et décès causés par la COVID-19 aux États-Unis
Au 20 juin 2021. Moyennes mobiles sur sept jours du nombre quotidien de nouveaux cas et de décès. Sources : WHO, Macrobond, RBC GMA
Variant Delta
Tous les pays développés ne sont toutefois pas sur la bonne voie. Au Royaume-Uni, les infections continuent d’augmenter et ne sont plus insignifiantes en nombre : le pays compte maintenant plus de 10 000 nouveaux cas par jour (voir le graphique suivant).
Cas de COVID-19 et décès causés par la COVID-19 au Royaume-Uni
Au 20 juin 2021. Moyennes mobiles sur sept jours du nombre quotidien de nouveaux cas et de décès. Sources : WHO, Macrobond, RBC GMA
La cause de cette flambée est évidente : le variant Delta a presque entièrement remplacé les autres souches (voir le graphique suivant).
Nombre de cas liés aux variants de la COVID-19 au Royaume-Uni
Au 20 juin 2021. Pourcentage de cas par variant. Sources : GISAID, RBC GMA
D’emblée, il est surprenant que le Royaume-Uni éprouve des difficultés, étant donné qu’il fait partie des chefs de file mondiaux sur le plan de la vaccination et qu’il a imposé des restrictions plutôt strictes au printemps. Il se pourrait simplement que le Royaume-Uni ait eu la malchance d’accumuler hâtivement une masse critique de cas du variant Delta et que d’autres pays développés subissent une situation similaire au cours des prochains mois.
Par ailleurs, la vulnérabilité du Royaume-Uni peut s’expliquer par divers facteurs :
- Une part importante de sa population a reçu le vaccin d’AstraZeneca, qui semble un peu moins efficace contre le variant.
- Les citoyens britanniques âgés de moins de 30 ans n’ont été admissibles à la vaccination que le 7 juin, de sorte qu’une fraction importante de la population du pays ayant beaucoup d’interactions sociales n’a été protégée que tout récemment.
- Le variant Delta s’est aussi installé dans des régions du pays où les taux de vaccination étaient plus faibles qu’ailleurs, comme à Bolton. Ce retard a maintenant été rattrapé, et Bolton enregistre désormais un nombre décroissant de nouveaux cas par jour.
- Le Royaume-Uni a indiqué que la grande majorité des personnes atteintes du variant Delta qui sont hospitalisées n’avaient pas été vaccinées.
Si le Royaume-Uni fait figure d’exception à cet égard, peut-être que les autres pays échapperont à une nouvelle vague. Il est néanmoins inquiétant que le variant Delta semble circuler de plus en plus dans de nombreux pays développés, y compris au Canada. Nos calculs indiquent qu’il se propage rapidement, tandis que le variant Alpha (ou britannique) recule (voir le tableau suivant).
Le variant Delta gagne du terrain au Canada
Au 18 juin 2021. Gouvernement du Canada, RBC GMA
Ainsi, bien que le taux global d’infection au Canada ait chuté en deçà de 1 000 nouvelles transmissions par jour (voir le graphique suivant), il existe un risque que la tendance commence à s’inverser si les deuxièmes doses de vaccin ne sont pas administrées assez rapidement.
Cas de COVID-19 et décès causés par la COVID-19 au Canada
Au 20 juin 2021. Moyennes mobiles sur sept jours du nombre quotidien de nouveaux cas et de décès. Sources : OMS, Macrobond, RBC GMA
Même si le variant Delta présente un taux de reproduction extrêmement fort (supérieur de 60 % au variant arrivant deuxième en termes de contagion), qu’il s’accompagne d’un taux d’hospitalisation et de mortalité un peu plus élevé et qu’il a le potentiel d’infecter des personnes partiellement vaccinées, il y a quelques bonnes nouvelles. Une analyse du Financial Times révèle que même une dose unique de vaccin est efficace à 70 % pour prévenir les hospitalisations. Autrement dit, si la vaccination partielle n’est efficace qu’à 33 % pour empêcher une infection, elle peut prévenir les conséquences très graves.
Étant donné que le niveau actuel des restrictions paraît insuffisant pour limiter la propagation du variant Delta et que l’immunité collective n’est pas atteignable tant que les enfants ne seront pas vaccinés (ce qui risque même de ne pas arriver), il semble probable qu’il y aura une autre vague du virus. Cependant, comme le taux de mortalité n’a pas augmenté durant la troisième vague, ce dernier de même que le taux d’hospitalisation sont susceptibles de rester relativement bas advenant une quatrième vague. Dans la mesure où les politiques publiques ont été déterminées en grande partie en fonction de la capacité hospitalière, cela donne à penser que les gouvernements ne procéderont pas à un confinement ou n’imposeront que des règles légèrement plus strictes.
En retour, les dommages économiques devraient être moins importants. Nous avons anticipé des dommages économiques très mineurs au cours de la deuxième moitié de l’été, mais rien de plus.
La question des écoles primaires demeure un problème épineux. Tant que les enfants ne seront pas vaccinés, les écoles primaires resteront un terrain fertile pour la propagation du variant Delta. À moins que la vaccination des enfants ne soit approuvée rapidement, il pourrait être problématique d’ouvrir des écoles primaires à l’automne, du moins sans précautions importantes en matière de sécurité.
Réouvertures
À l’échelle mondiale, les restrictions gouvernementales ont commencé à se resserrer légèrement (voir le graphique suivant – une pente ascendante indique un resserrement). Nous soupçonnons que cela reflète principalement l’imposition de règles plus strictes par les pays émergents, compte tenu de la hausse de leurs taux d’infection. À l’inverse, la plupart des pays développés ont rouvert avec enthousiasme (voir le graphique suivant – une pente ascendante indique un assouplissement).
Indice de rigueur dans le monde
Au 20 juin 2021. L’indice de rigueur dans le monde évalue la rigueur des mesures de confinement qui restreignent la mobilité dans les 50 plus grandes économies. Sources : Université d’Oxford, Fonds monétaire international (FMI), Macrobond, RBC GMA
La rigueur des mesures de confinement varie d’un pays à l’autre
Selon les dernières données disponibles au 17 juin 2021. Écart par rapport au niveau de référence normalisé en fonction des États-Unis et lissé au moyen d’une moyenne mobile sur sept jours. Sources : Google, Université d’Oxford, Macrobond, RBC GMA
Parmi les pays examinés, le Canada demeure le plus confiné, bien qu’il commence à lever certaines règles. Nous notons que chaque région du pays a quelque peu assoupli ses restrictions. C’est l’Ontario qui en a fait le moins à cet égard et qui demeure de loin la province la plus confinée (voir le graphique suivant – une pente descendante indique un assouplissement).
Les restrictions liées à la COVID-19 de nouveau assouplies
Au 9 juin 2021. Les provinces de l’Atlantique sont le Nouveau-Brunswick, Terre-Neuve-et-Labrador, la Nouvelle-Écosse et l’Île-du-Prince-Édouard. Les Prairies comprennent l’Alberta, le Manitoba et la Saskatchewan. Sources : Banque du Canada, RBC GMA
Témoignant de ces efforts de réouverture, un nombre croissant d’entreprises canadiennes affirment avoir repris leurs activités au début de juin (voir le graphique suivant). Il s’agit là d’un signe que l’économie commence à se redresser après des mois d’avril et de mai difficiles.
Les entreprises canadiennes fermées de nouveau pendant la troisième vague
Au 7 juin 2021. Sources : Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), RBC GMA
Vaccination
Après avoir mis la priorité sur l’administration des premières doses du vaccin, les pays développés se concentrent maintenant davantage sur l’administration des secondes. Cela s’explique en partie par le fait qu’un pourcentage important des populations ont déjà reçu leur première dose, mais aussi par le fait qu’une deuxième dose semble être nécessaire pour assurer une protection adéquate contre le variant Delta.
À l’échelle mondiale, plus de 2,6 milliards de doses ont été administrées, soit 34 doses par tranche de 100 personnes. La vaccination progresse maintenant à un rythme admirable de 39,7 millions de doses par jour.
Le tableau des meneurs demeure essentiellement le même (voir le tableau suivant). Les Émirats arabes unis, Israël et Bahreïn dominent le classement. Parmi les grands pays, le Royaume-Uni et les États-Unis viennent en tête, bien que le Royaume-Uni devance maintenant largement les États-Unis. Le Canada se classe tout juste derrière, avec 85 doses par 100 habitants, contre 95 aux États-Unis. Fait remarquable, le Canada vaccine maintenant à un rythme quatre fois plus rapide qu’aux États-Unis par habitant, et n’est devancé à cet égard que par la Chine, à un rythme ajusté selon la population.
Vaccination contre la COVID-19 : classement mondial
Au 20 juin 2021. Nombre cumulatif total de doses administrées par pays par 100 habitants. Sources : Our World in Data, Macrobond, RBC GMA
Réticence face à aux vaccins
Aux États-Unis, la réticence à se faire vacciner devient problématique. Malgré l’abondance des vaccins, seulement un peu plus de la moitié des Américains ont maintenant reçu leur première dose (53 %). Les marchés des paris sont devenus plus pessimistes et doutent maintenant fortement que les États-Unis réussissent à vacciner pleinement 80 % de leur population d’ici le printemps prochain (une probabilité de 13 % seulement) ; il est encore moins probable qu’ils parviennent à atteindre le taux de vaccination de 90 % ou plus qui serait nécessaire pour conférer une immunité collective contre le variant Delta.
Certains États américains s’en tirent plutôt bien, le Vermont se targuant même du fait que 73 % de sa population a reçu au moins une dose et 63 % les deux doses. D’autres, comme le Mississippi, affichent un taux de vaccination moins de deux fois moindre. Ainsi, à peine 35 % de la population du Mississippi a reçu une dose, et seulement 29 % en ont obtenu deux.
Le Mississippi rapporte davantage de cas par habitant que le Vermont, mais les taux d’infection dans les deux États sont relativement faibles et n’affichent pas de hausse marquée. Il est difficile de savoir si cette situation est attribuable au temps plus chaud qui tient le virus en échec, au fait que le taux d’immunité naturelle au Mississippi est plus élevé en raison des infections antérieures, ou à d’autres facteurs. À première vue, le Mississippi et les États comparables semblent être très vulnérables au variant Delta.
Au Canada, la campagne de vaccination a tardé à se mettre en branle, mais le pays devance aujourd’hui nettement les États-Unis pour ce qui est du nombre de personnes ayant été au moins partiellement vaccinées (67 % de la population). En fait, selon ce paramètre, le Canada se classe au deuxième rang mondial, est n’est devancé que par Malte. Ce résultat est toutefois en grande partie attribuable à la décision du Canada de poursuivre une stratégie misant sur l’administration d’une première dose pour tenter de protéger au moins partiellement le plus grand nombre possible de personnes dès le début, et de reporter l’administration de la deuxième dose. En conséquence, 45 % de la population des États-Unis est entièrement inoculée, contre seulement 18 % des Canadiens. Le Canada est toutefois en train de remonter la pente à cet égard en juin et semble devoir composer avec beaucoup moins de réticence à l’égard des vaccins que les États-Unis.
Autres développements liés aux vaccins
Les États-Unis ont promis de partager 500 millions de doses de vaccins excédentaires avec leurs pays amis. Le pays gère un important excédent de doses et a donc une occasion de faire preuve d’une plus grande diplomatie vaccinale.
La pharmaceutique Novavax vient d’annoncer les résultats de ses essais cliniques de phase III, qui font état d’un taux d’efficacité élevé de 93 % contre les variants de la COVID-19. Ce résultat est légèrement inférieur à ceux de Pfizer et de Moderna, mais ces derniers n’ont pas fait l’objet de tests aussi exhaustifs contre les variants les plus récents et les plus virulents. Par conséquent, il semble être aussi efficace que tous les autres vaccins existants. Les pays doivent maintenant s’empresser d’autoriser son utilisation d’urgence.
Le vaccin Novavax est élaboré différemment des vaccins à ARN messager ou du vaccin AstraZeneca. Il s’agit d’un vaccin à « sous-unité protéique » qui repose sur les mêmes techniques que celles utilisées pour le vaccin annuel contre la grippe. Il s’agit du premier vaccin efficace de l’entreprise.
Novavax prévoit de produire 100 millions de doses par mois d’ici la fin du troisième trimestre de 2021, et de faire passer ce nombre à 150 millions de doses par mois dès le quatrième trimestre. L’entreprise ne dispose pas d’une capacité de fabrication importante, ce qui signifie qu’elle doit s’en remettre à des fabricants tiers.
Publication de prévisions actualisées
Le dernier Regard sur les placements mondiaux présente de nouvelles prévisions économiques. Ces prévisions ne sont pas supérieures aux prévisions générales de façon aussi fiable qu’au cours des trimestres précédents (voir le tableau suivant). Ainsi, à l’heure actuelle, elles sont techniquement inférieures au consensus pour les États-Unis, et ce, malgré une importante révision à la hausse des prévisions de croissance du PIB pour 2021, qui s’établissent maintenant à 6,4 %. De même, nos prévisions sont simplement conformes au consensus en ce qui concerne la croissance du PIB canadien, que nous avons revue à la hausse, à 6,1 %.
Prévisions revues du PIB par RBC GMA
Prévisions de RBC GMA au 27 mai 2021. RBC GMA rel. à CE, calculé en soustrayant les prévisions de Consensus Economics (CE) de celles de RBC GMA. Les pays développés comprennent les États-Unis, le Canada, la zone euro, le Royaume-Uni et le Japon. Le monde comprend les pays développés susmentionnés, la Chine, l’Inde, la Corée du Sud, le Brésil, le Mexique et la Russie. Les prévisions de CE de mai 2021 pour le Brésil, le Mexique et la Russie ont servi à établir les prévisions sur l’évolution du PIB mondial de juin 2021. Sources : CE, RBC GMA
Après une année au cours de laquelle le pari gagnant consistait presque toujours à miser sur une croissance supérieure au consensus, nous croyons qu’un retour partiel du balancier s’est amorcé. Les surprises économiques sont devenues moins agréables au cours des derniers mois et ont en grande partie déjà été prises en compte dans les prévisions (et sur les marchés financiers).
En outre, toutes choses étant égales par ailleurs, on peut s’attendre à ce que les actifs à risque dégagent au cours de la prochaine année des rendements moins démesurés que l’année dernière.
Évolution de la conjoncture économique
La confiance selon les nouvelles s’effrite-t-elle ?
L’indice américain de confiance selon les nouvelles quotidiennes a fléchi ces derniers temps (voir le graphique suivant). Il demeure relativement solide en valeur absolue, mais affiche tout de même son recul le plus marqué depuis la première vague de la pandémie l’an dernier.
L’indice de confiance selon les nouvelles quotidiennes à l’heure de la COVID-19
Au 6 juin 2021. Sources : Réserve fédérale de San Francisco, Macrobond, RBC GMA
Il est possible que ce plus récent développement ne soit rien de plus que de l’agitation. Mais il pourrait aussi signaler une transition par rapport à une phase où les données économiques étaient presque toujours supérieures aux prévisions, où les vaccins étaient administrés à un rythme record et où les décideurs politiques levaient les restrictions vers une autre caractérisée par plusieurs freins :
- Les données économiques demeurent favorables sans être étonnantes.
- Le taux d’inoculation aux États-Unis a diminué de plus de la moitié.
- Le variant Delta suscite davantage de préoccupations.
- L’inflation est inquiétante.
- La Réserve fédérale américaine envisage de resserrer sa politique monétaire.
Rattraper le temps perdu
Dans le débat opposant ceux qui croient que la demande accumulée freinera l’économie et ceux qui croient plutôt qu’elle la propulsera, les premiers sont en train de marquer des points.
Les gens semblent en fait avoir très hâte de faire des choses dont ils avaient été privés. Le taux d’occupation des hôtels aux É.-U. est actuellement plus élevé qu’il l’était avant la pandémie (voir le graphique suivant). Il faut quand même dire que des facteurs saisonniers jouent sans doute un rôle ici. Malgré tout, l’ascension actuelle et le lancement de la saison touristique laissent croire que le taux d’occupation pourrait encore augmenter considérablement, effaçant ainsi tout doute quant au rétablissement du secteur.
Le taux d’occupation des hôtels aux États-Unis reprend son ascension
En date de la semaine se terminant le 2021-06-12. Sources : STR, Wall Street Journal et RBC GMA
Évolution de la situation au Canada
Bien que le Canada ait été confiné jusqu’à tout récemment, des signes montrent que les consommateurs se tournent vers des secteurs en difficulté. À titre d’exemple, les dépenses de voyage, qui, au plus fort de la crise, avaient chuté de 86 % par rapport aux niveaux de 2019, sont maintenant à seulement 56 % de ces derniers. De même, les dépenses dans le segment de l’hébergement sont passées de -62 % à -40 %.
Même si selon l’estimation provisoire le PIB du pays a reculé en avril et si selon nous il est demeuré à peu près stable en mai, il pourrait bien terminer le deuxième trimestre en légère hausse. S’il se concrétisait, un tel résultat serait le bienvenu.
Dans le même ordre d’idées, nous estimons que l’économie canadienne se trouvait à moins de 2 % de son sommet à la fin de mai. Autrement dit, environ 90 % des pertes subies pendant la pandémie ont été récupérées (le PIB avait chuté de 18 % au pire de celle-ci). Ce n’est probablement qu’une question de mois avant que l’économie établisse de nouveaux records. Soulignons néanmoins qu’il faudra attendre un an avant qu’elle fonctionne de nouveau à son plein potentiel.
Le PIB nominal du Canada est déjà nettement supérieur à ce qu’il était avant la pandémie. Sans être une donnée déterminante, c’est tout de même notable. Bien sûr, cela signifie simplement que les prix sont considérablement plus élevés qu’ils l’étaient avant la pandémie, même si la production demeure inférieure.
La Banque du Canada garde le cap
Dans sa dernière décision à l’égard des taux d’intérêt, la Banque du Canada est restée sur ses positions. Elle a répété que l’inflation élevée est temporaire bien que l’indice des prix à la consommation (IPC) ait progressé de 3,4 % d’une année sur l’autre, et fait valoir que l’évolution de l’économie était conforme à ses attentes (malgré que le mois d’avril ait été un peu plus difficile que prévu).
La banque centrale juge qu’il subsiste une marge de capacités excédentaires considérable et maintient sa projection selon laquelle elles se seront résorbées au deuxième semestre de 2022. Ce serait le moment idéal pour commencer à hausser le taux directeur. Le programme d’assouplissement quantitatif a déjà été réduit du quart, et il devrait l’être encore davantage au cours des prochains trimestres.
La Réserve fédérale adopte une position plus ferme
Aux États-Unis, la Réserve fédérale a choisi une orientation plus austère. En toute justice, elle avait été si conciliante jusqu’ici que ce revirement était presque inévitable.
Elle a reconnu que l’inflation avait augmenté, estimant par ailleurs que la hausse était pour l’essentiel transitoire. Sa décision est aussi dictée par la progression continue de l’économie. Dans ce contexte, elle a relevé ses prévisions pour le PIB de 2021 de 6,5 % à 7,0 % (il s’agit d’une formule Q4/Q4, et le résultat correspond imparfaitement à nos propres prévisions dont il a été question plus tôt). Elle s’attend maintenant à ce que d’ici la fin de l’année, le taux de chômage baisse à 4,5 %, s’établissant ainsi non loin du « plein emploi ».
Plus significatif encore est le fait que la Fed a revu à la hausse ses prévisions d’inflation pour la fin de 2021, qui sont passées de 2,4 % à 3,4 %. Si elle ne s’attend pas à ce que la plupart des tensions inflationnistes perdurent, elle ne s’attend pas non plus à ce qu’elles disparaissent complètement au cours des prochains mois. Pour 2022 (2,1 %) et 2023 (2,2 %), toutefois, ses prévisions d’inflation ne sont que de 0,1 point de pourcentage supérieures à la projection précédente. À environ 2,5 %, nos prévisions pour le dernier exercice sont un peu plus élevées. Compte tenu du risque que la projection de la Fed soit trop basse, 13 des 18 membres de la Fed affirment que le risque lié à leurs prévisions d’inflation est plus ascendant que descendant.
La grande question était de savoir comment les membres de la Fed ajusteraient leurs projections pour le taux des fonds fédéraux. Selon la prévision médiane, il y aurait deux hausses de taux de 25 points de base (pb) en 2023. Soulignons qu’au trimestre dernier, on ne prévoyait aucune hausse en 2024. Or, 13 des 18 membres s’attendent maintenant à une hausse de taux en 2023. Ils n’étaient que 7 en mars.
La prévision médiane ne prévoit pas d’augmentation du taux directeur en 2022, mais il s’en est fallu de peu. En effet, 7 des 18 membres de la Fed s’attendent à une hausse l’an prochain alors qu’ils n’étaient que 4 en mars.
Les marchés financiers devancent la Fed depuis un certain temps. Ils ont néanmoins relevé leurs attentes à la suite de la dernière annonce. Avant la réunion, ils estimaient à 70 % la probabilité d’une hausse de 25 pb d’ici la fin de 2022 ; cette augmentation est maintenant pleinement prise en compte.
La Fed ne s’est pas prononcée sur la date où elle réduirait l’assouplissement quantitatif, répétant comme d’habitude qu’elle maintiendrait le rythme actuel jusqu’à ce qu’elle observe « d’autres progrès considérables » en matière d’emploi maximum et de stabilité des prix. Comme on peut affirmer que la cible d’inflation est atteinte et que la cible sur l’emploi pourrait l’être d’ici le début de l’an prochain, on peut raisonnablement s’attendre à une réduction du programme d’achat d’obligations dès cet automne. Rappelons toutefois que la Fed ne l’a pas dit explicitement. À cet égard, le procès-verbal de la réunion sera beaucoup plus révélateur.
Techniquement parlant, la Fed dénoue déjà certaines mesures de relance extraordinaires. Par exemple, la semaine dernière, elle a commencé à vendre des parts de FNB de titres de créance pour un montant de 8 milliards de dollars.
De façon générale, il semblerait que la Fed prenne davantage au sérieux la vigueur de la reprise économique et le risque d’inflation persistante aux États-Unis. Ce constat augure bien pour l’économie américaine, car il lui évite de surchauffer de façon prématurée, mais en haussant les coûts d’emprunt, il freine légèrement la progression de l’activité économique et des actifs à risque.
Complément sur l’inflation
Dans l’esprit des gens, l’inflation demeure l’un des principaux risques sur l’économie et les placements. Par conséquent, nous continuons de vous faire part de nos impressions à ce sujet dans presque chaque édition du #MacroMémo. De façon générale, nous prévoyons encore une inflation très élevée au cours des prochains mois, une inflation légèrement supérieure au cours des prochaines années, puis une inflation normale ou inférieure à la normale à long terme.
Récemment publié, l’IPC des États-Unis pour mai a encore surpris par sa vigueur, qui prend la forme d’une hausse confortable de 5,0 %. Il s’agit du meilleur résultat depuis 2008, date où la fin imminente du supercycle des marchandises avait temporairement hissé l’inflation au-delà de ce chiffre.
Nous croyons que l’inflation aux États-Unis n’ira pas plus loin. À vrai dire, les effets de base commencent à travailler en direction opposée. Ainsi, pour que le chiffre annuel reste tel quel, il faudrait que les prix augmentent considérablement en juin et en juillet. En effet, les hausses de prix par rapport à juin et juillet 2020 n’entreront plus dans le calcul. Cependant, compte tenu des fortes hausses mensuelles observées récemment ainsi que des difficultés sur le plan de l’offre, nous sommes encore moins certains que l’inflation finira par reculer considérablement. Ainsi, elle devrait osciller autour de 5 % pendant encore quelques mois avant de commencer à descendre cet automne.
Frais d’expédition
Les frais d’expédition comptent parmi les motifs les plus souvent invoqués pour justifier la hausse de l’inflation, et pour cause. Selon l’indice mondial des conteneurs Drewry, les frais d’expédition par voie maritime ont quintuplé depuis un an (voir le graphique suivant). Comme on peut s’y attendre, la hausse des frais d’expédition est particulièrement importante pour les produits venant de la Chine. La raison : ce pays fabrique bon nombre de biens convoités par les consommateurs durant le confinement.
Les frais d’expédition ont bondi pendant la pandémie
Données pour la semaine se terminant le 17 juin 2021. Sources : Drewry Supply Chain Advisors, RBC GMA
Jusqu’à présent, rien n’indique que les frais d’expédition ont atteint un plateau. Nous suivrons leur évolution de près au cas où il y aurait des changements.
L’inflation sur les marchés émergents
Comme c’est généralement le cas, les marchés émergents sont davantage touchés par la montée de l’inflation que les marchés développés. À titre d’exemple, l’inflation de l’Inde est passée à 13 % sur 12 mois, et celle du Brésil a atteint 8 % sur 12 mois.
Ce phénomène s’explique par différentes raisons :
- Les attentes inflationnistes des pays émergents sont généralement peu ancrées. Autrement dit, tout écart temporaire peut avoir des conséquences durables.
- Le panier de dépenses dans ces marchés est généralement axé sur les produits essentiels (aliments, carburant), dont les prix ont fortement bondi.
- Les banques centrales des marchés émergents tolèrent mal l’inflation élevée, qui peut provoquer un exode des capitaux provenant des investisseurs étrangers.
Voilà qui oblige certaines banques centrales (Russie, Brésil, Turquie) à hausser leurs taux directeurs et, ce faisant, à hypothéquer leur reprise économique.
En revanche
Par contre, d’autres événements donnent à penser que la menace d’inflation s’est récemment quelque peu atténuée, notamment le fait que la Réserve fédérale américaine semble s’être rendu compte de cette menace et qu’elle envisage de durcir sa politique monétaire. La Chine aussi se prépare à affronter une inflation durablement forte.
Insouciance du marché obligataire
Depuis quelques mois, la perspective d’une inflation élevée semble moins préoccuper le marché obligataire, et ce, malgré la remontée effective de l’inflation.
Ainsi, le taux nominal des obligations américaines à dix ans a fléchi, passant de 1,74 % à la fin de mars à tout juste 1,48 % actuellement. Or, une telle baisse ne se produirait probablement pas si l’on s’attendait à ce que l’inflation augmente considérablement ou demeure élevée pendant longtemps.
De même, le taux d’équilibre sur cinq ans aux États-Unis – un baromètre des attentes inflationnistes – a reculé, passant de 2,77 % à la mi-mai à 2,42 % en ce moment. Ce taux n’est pas très bas, mais il reflète une diminution des craintes d’inflation plutôt que leur intensification.
Supercycle des marchandises
Les prix du pétrole ont poursuivi leur progression – le prix du baril de West Texas Intermediate est actuellement de 71 $ –, mais on ne sait pas combien de temps cette hausse pourra durer. Après tout, la demande reste inférieure à la normale et il est peu vraisemblable qu’elle y revienne dans un monde caractérisé par le télétravail et des voyages internationaux limités. De plus, l’OPEP conserve d’importantes capacités de production non utilisées ; les producteurs américains de pétrole de schiste sont prêts à tirer parti d’une hausse des prix ; à long terme, la demande de pétrole devrait plafonner dans une dizaine d’années à peine.
Par ailleurs, malgré les arguments raisonnables en faveur d’un possible boom des métaux de base, la réalité est que les prix du minerai de fer et du cuivre ont chuté de 14 % et de 13 %, respectivement, depuis le début de mai.
Rien de tout cela ne garantit que les prix des marchandises plafonnent durablement, mais pour l’instant, ils ont en fait un peu diminué. Cette situation devrait légèrement réduire les pressions inflationnistes.
Autres mesures de l’inflation de base
Il est intéressant de constater que certaines mesures non traditionnelles de l’inflation de base montrent que les choses ne sont pas aussi tendues. Par exemple, aux États-Unis :
- la moyenne tronquée de l’inflation se situe actuellement à seulement 1,8 % sur 12 mois ;
- l’inflation médiane s’établit à tout juste 2,1 % sur 12 mois.
En comparaison, l’IPC de base officiel, qui exclut l’alimentation et l’énergie, a pris 3,8 % sur 12 mois.
Cela ne signifie pas nécessairement que les mesures accessoires sont meilleures (même si la Banque du Canada le croit et a abandonné les indices excluant des composants fixes, il y a quelque temps). Par contre, elles mettent en lumière la nature de l’inflation actuelle. Ces deux mesures de remplacement excluent les produits dont les prix affichent les hausses et les baisses les plus fortes. Elles permettent de constater qu’en général les prix n’ont pas sensiblement augmenté.
En fait, beaucoup de produits connaissent une inflation plutôt normale et seulement une poignée affiche des hausses de prix spectaculaires. Comme ces dernières ont quand même une incidence sur le coût de la vie, on ne peut les ignorer. Toutefois, on voit bien qu’en ce moment, l’inflation élevée ne représente pas un phénomène généralisé, mais découle de problèmes particuliers qui touchent quelques secteurs.
Temps réel
Comme nous en avons discuté dans une édition précédente du #MacroMémo, les prix à la consommation dénichés sur le Web en temps réel donnent toujours à penser que l’inflation a atteint son sommet il y a peut-être un mois et qu’elle commence maintenant à ralentir légèrement. Voilà une autre bonne nouvelle.
Tendances postpandémiques
Lorsque nous imaginons le monde au lendemain de la pandémie, très peu de choses auront changé pour de bon, selon nous, hormis le montant de la dette publique et le nombre d’heures passées au bureau. Dans l’ensemble, la vie reviendra à la normale au cours des prochaines années.
Un article publié récemment dans le magazine Economic présente les résultats d’une étude approfondie sur les pandémies, les crises et les guerres passées, et les changements qu’elles ont apportés :
- Les économies se rétablissent généralement assez rapidement après une crise. Malgré cela, les années 1920 n’ont pas été aussi folles qu’on le raconte après la pandémie de grippe espagnole. En fait, elles ont été assez ordinaires selon de nombreux paramètres.
- Les taux d’épargne grimpent d’habitude en période de crise, comme c’est le cas actuellement.
- Et les gens ne s’empressent pas de vider leur bas de laine une fois la crise terminée. Par exemple, au cours des quatre années qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, les consommateurs américains n’ont dépensé qu’environ 20 % des économies excédentaires qu’ils avaient accumulées durant le conflit.
- Rien ne permet de croire que les gens nagent dans l’euphorie pendant très longtemps à la suite d’une crise ; d’ailleurs, la consommation de bière a diminué après la Seconde Guerre mondiale, et non le contraire.
- Certaines pandémies augmentent l’appétit pour le risque. Ainsi, la peste a provoqué une hausse du nombre de personnes parties s’installer au Nouveau Monde. Aussi, le nombre de nouvelles entreprises a explosé en 1919 après la grippe espagnole. On observe le même phénomène aujourd’hui. Nous nous attendons à ce que la productivité croisse rondement à l’avenir.
- Les pandémies accélèrent généralement l’automatisation, ce qui contribue également à l’augmentation de la productivité. C’est dans les années 1920, par exemple, que le réseau téléphonique a été automatisé. Les entreprises qui ne pouvaient permettre à leurs employés de travailler à proximité les uns des autres pendant la pandémie actuelle ou qui n’arrivent pas à embaucher une main-d’œuvre suffisante cette année se tournent elles aussi vers l’automatisation.
- Les périodes qui suivent une pandémie peuvent en revanche donner lieu à un élan « protravailleur ». La dette publique et l’inflation ne sont alors plus la priorité, il faut avant tout aider les gens. Cette tendance pourrait perdurer en partie.
- Selon un récent rapport du FMI, les pandémies sont souvent suivies par une période de tensions politiques, ainsi que par des troubles sociaux, qui atteignent un point culminant deux ans plus tard.
Ces tendances ne se concrétiseront pas toutes au cours des prochaines années. La plupart de celles qui se matérialiseront seront passagères (même si quelques-unes persistent plusieurs années). Par contre, certaines d’entre elles pourraient avoir une incidence considérable.
– Avec la contribution de Vivien Lee et de Lucas Hervato
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