Dans cette vidéo, Brad Willock, premier vice-président et gestionnaire de portefeuille, Actions nord-américaines, discute du contexte actuel du marché des actions américaines et fait part de ses perspectives pour l’année à venir. Plus particulièrement, il explore l’incidence potentielle d’un resserrement de la politique monétaire et des négociations sur le plafond de la dette, ainsi que la façon dont il structure son portefeuille en réponse.
Durée : 10 minutes 46 secondes
Transcription
Les niveaux de valorisation actuels du S&P 500 vous préoccupent-ils ?
Le paradigme de la valorisation sur le marché complique les choses. Sous l’angle historique, le marché est cher. Son multiple est d’environ 21 fois le bénéfice de l’année prochaine. L’histoire a montré qu’ordinairement, ce multiple serait de 17 fois ou de 16 fois.
Il faut donc tout de même se rappeler que la valorisation n’influence pas beaucoup le niveau des rendements dans un ou deux ans. Elle façonne plutôt les rendements sur un horizon de dix ans.
L’un des facteurs ayant vraiment influé sur les valorisations au cours de la dernière année est le fait que le multiple était de 23 fois il y a environ un an et qu’il est maintenant inférieur à 21 fois. La valorisation a diminué, mais cela est dû à l’incroyable solidité des bénéfices. Au début de l’année, on estimait qu’ils étaient à 175 $, et maintenant, cette estimation est passée à un peu plus de 200 $. La situation a donc fortement changé.
J’ai géré le portefeuille en essayant de le maintenir plutôt équilibré avec un peu de croissance et un peu de valeur, tout en l’axant sur des sociétés qui affichent un parti pris à l’égard d’une qualité élevée. Et c’est certainement là qu’il faut se trouver dans ce genre de marché.
La valorisation des titres à dividende semble-t-elle plus raisonnable ?
Les actions à dividendes ne ressemblent pas beaucoup au marché dans son ensemble, puisque, par exemple, cette stratégie ne contient pas de sociétés comme Amazon dont la valorisation est très élevée, ou Tesla, ou d’autres sociétés de ce type. De nombreuses sociétés de logiciels Internet ont des valorisations très élevées et une capitalisation boursière élevée, et elles ont donc une incidence sur l’indice.
Les sociétés composant l’univers des dividendes sont évaluées de manière bien plus juste, bien qu’elles ne soient toujours pas bon marché, hormis quelques secteurs, par exemple les banques, l’énergie, une partie des matières et même des produits industriels. En général, toutefois, l’histoire montre que ces secteurs ne sont pas bon marché. C’est néanmoins le cas, et nous axons sans aucun doute un peu le portefeuille sur ces secteurs.
Quelle sera l’incidence du resserrement de la politique monétaire de la Réserve fédérale sur les marchés ?
On s’attend à ce que la Réserve fédérale commence à opérer un resserrement, à savoir réduire le montant de ses achats d’obligations. Ce processus devrait commencer en novembre et se terminer au milieu de l’année prochaine.
Il faut absolument que les investisseurs se rendent compte que ce n’est pas grave. La Réserve fédérale en parle depuis longtemps, les investisseurs en parlent depuis longtemps et nous pensons que ce processus est bien intégré dans le marché. Et la Réserve fédérale a fait des pieds et des mains pour éviter toute surprise à ce titre. Je ne pense pas que les gens seront pris de court, et le marché ne devrait donc pas réagir fortement.
Ce qui compte le plus, c’est le moment auquel la Réserve fédérale rehaussera les taux et le rythme auquel elle le fera. À l’échelle mondiale, les taux d’intérêt augmentent, notamment dans de nombreux pays à marché émergent. Leurs banques centrales augmentent les taux depuis quelque temps. Même la Norvège s’y est mise.
Ainsi, la Réserve fédérale, l’Europe et le Japon, entre autres, mènent encore une politique très accommodante, mais nous prévoyons que la Réserve fédérale modifiera ses taux. Cet événement aura néanmoins probablement lieu en 2023. Il n’y a donc pas de quoi s’inquiéter pour l’instant, puisqu’aucune incidence véritable n’est attendue au cours des 12 prochains mois.
Quels sont les thèmes de marché qui motivent actuellement vos décisions en matière de positionnement du portefeuille ?
Le portefeuille a certainement été remodelé en prévision des différents changements attendus au cours de la prochaine année. Par exemple, nous supposons que les taux d’intérêt afficheront une tendance à la hausse, quoique timide. Je ne m’attends pas à ce qu’ils dépassent 2 %, par exemple. Nous prévoyons aussi que l’inflation restera à un niveau un peu trop élevé pendant un certain temps, mais qu’elle se rapprochera ensuite de 2 % l’an prochain, peut-être au deuxième semestre.
Et nous nous attendons aussi à une hausse probable des impôts, du taux d’imposition, du taux d’imposition des sociétés aux États-Unis. Il s’agit ici du plus grand joker, car si une telle hausse se produit, les bénéfices fléchiront probablement d’environ 5 %, ce qui pourrait aussi ramener la croissance des bénéfices l’année prochaine, maintenant estimée à 9 %, à moins de 5 %. Je pense que le marché n’apprécierait pas cela. Je ne pense pas que cette hausse soit bien intégrée dans le marché, mais nous l’utiliserions comme une occasion de renforcer les actions, si le marché désapprouvait l’adoption de ce projet de loi entraînant une hausse d’impôts.
Un autre élément dont nous tenons compte est la bonne santé des consommateurs américains. Ils ont vu leurs maisons s’apprécier, tout comme leurs portefeuilles d’actions, et qui plus est, le nombre d’emplois disponibles dépasse largement le nombre de personnes au chômage en ce moment. Les salaires augmentent à un taux de 5 %, et nous nous attendons donc à ce que le consommateur aille très bien au cours des 12 prochains mois. Le portefeuille reflète donc cette anticipation.
Nous nous attendons également à ce que les entreprises financent largement les projets d’investissement, en particulier la technologie, pour renforcer leur productivité. De nos jours, il est difficile de trouver de la main-d’œuvre. Les gens prennent leur retraite, nombreux sont ceux qui ne retournent pas sur le marché du travail pour diverses raisons, et les entreprises sont forcées d’adopter la technologie pour être plus productives. C’est en réalité passionnant, car les entreprises du S&P 500 s’endettent fortement pour investir dans les logiciels, la technologie et les biens d’équipement qui accroissent leur productivité.
Quelles sont vos perspectives pour les actions américaines au cours des 12 prochains mois ?
Eh bien, les perspectives pour les 12 prochains mois sont compliquées. Commençons par les bénéfices. Comme je l’ai dit auparavant, leurs prévisions actuelles de croissance avoisinent les 9 %. Mais en cas de hausse d’impôts, nous devrions probablement nous faire à l’idée d’une croissance de 4 ou 5 %. Et puis, comme je l’ai mentionné, les valorisations sont élevées et sans doute sous-évaluées, du moins probablement un peu. Il me semble que tout bien considéré, nous obtenons un rendement de l’ordre de 5 % ou légèrement moindre pour les 12 prochains mois.
Comme je l’ai dit, les principaux risques ici concernent la réforme fiscale. Ce serait le plus gros problème. Si la hausse d’impôt n’intervient pas en 2022, et une telle hausse pourrait être reportée après les élections de mi-mandat qui se tiendront à la fin de 2022, la question ne se pose pas, et il se peut que les marchés atteignent de nouveaux sommets.
Un autre risque est lié au ralentissement observé en Chine à cause de la politique chinoise visant à ralentir les grands secteurs et les régions du pays dès qu’ils présentent quelques cas ou des dizaines de cas de COVID, ou du moins à y imposer des mesures de confinement. Cette approche freine véritablement la Chine. Le pays a également des problèmes de crédit et d’autres problèmes à solutionner. Au final, la Chine constitue un facteur de risque.
L’inflation constitue un autre gros risque. Par exemple, l’une des plus grosses difficultés en ce moment pour les entreprises, du moins certaines d’elles, concerne la chaîne logistique. Vous avez peut-être lu des articles sur les conteneurs vides qui sont bloqués à Long Beach ou à Los Angeles dans l’attente d’un navire pour les transporter en Chine. Certains ports chinois qui servent habituellement à expédier des conteneurs chaque jour sont fermés en ce moment.
Aujourd’hui, 20 % de tous les conteneurs en partance de l’Asie pour les États-Unis restent sur place. C’est très étrange. En conséquence, les prix de la logistique ont augmenté, et de nombreuses cargaisons sont en transit. Par exemple, la durée de transit de l’Asie vers les États-Unis est d’environ 40 jours en moyenne, mais elle est maintenant passée à 80 jours. De nombreuses entreprises en pâtissent.
Bien entendu, la COVID demeure l’un des plus grands facteurs de risque. En ce moment, nous avons de la chance, car les cas semblent diminuer. Aux États-Unis, les hospitalisations sont également en baisse dans presque tous les États. Par conséquent, dans l’attente d’une relégation de la COVID au second plan et de la résorption des problèmes des chaînes logistiques l’année prochaine, il est possible que la situation s’améliore ou s’empire, selon le tour que prendront ces deux événements.
Enfin, la banque centrale me trotte toujours probablement dans la tête. Nous ne devons pas perdre la Réserve fédérale de vue. Un rehaussement des taux plus hâtif ou rapide que prévu de sa part pourrait être nuisible.
In fine, l’économie devrait poursuivre sa croissance au cours des 12 prochains mois et entraîner dans son sillage les revenus et les bénéfices. En raison du parti pris à l’égard d’une hausse d’impôts, les rendements devraient avoisiner les 5 % au cours des 12 prochains mois.
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