Jennifer McClelland, Vice-présidente et première gestionnaire de portefeuille, jette un éclairage sur la récente supériorité des actions canadiennes par rapport aux actions américaines et donne une idée de la structure de son portefeuille dans le présent contexte inflationniste. De plus, elle présente ses perspectives pour le secteur de l’énergie à moyen et à long terme. (en anglais seulement)
Durée : 9 minutes 34 secondes
Transcription
Le Canada surpasse les États-Unis jusqu’ici en 2022. Que pensez-vous de la persistance de cette tendance ?
Bonne question. Dès le début de l’année, le marché canadien était bien placé pour obtenir des résultats supérieurs. Notre économie nationale est en bonne position pour tirer profit de la fin de la pandémie, de la hausse de l’immigration et de la reprise économique en Alberta.
En ce qui concerne l’immigration, les cibles sont très ambitieuses, et nous n’avons pas vu grand-chose se réaliser en ce sens au cours des dernières années. De plus, compte tenu de la reprise des cours du pétrole, les perspectives de l’économie de l’Alberta sont nettement meilleures.
Dans l’ensemble, les bénéfices de l’indice TSX devraient d’ailleurs dépasser de 40 % les niveaux d’avant la pandémie. L’écart entre les valorisations des marchés canadien et américain perdure. Même si nous avons surclassé le marché américain, un certain écart subsiste, et les titres de notre marché se négocient toujours en deçà de ses niveaux historiques selon le ratio cours-bénéfices.
Et c’est sans oublier qu’une reprise cyclique est, en théorie, positive pour les banques, les matières et l’énergie. Ces trois secteurs représentent à eux seuls plus de 50 % de notre marché, soit bien plus que les autres marchés. Cela dit, nous avons aujourd’hui davantage de préoccupations qu’au début de l’année. La guerre en Ukraine persiste, ce qui fait grimper les prix des marchandises et plus encore. On évoque de plus en plus de scénarios de récession, entre autres.
Nous devons donc revoir certaines présomptions et, surtout, examiner leur incidence sur les banques canadiennes, d’autant plus que le relèvement des taux d’intérêt influera sur le marché immobilier.
Bref, nous réexaminons nos scénarios et l’incidence sur les bénéfices. De plus, les banques canadiennes ont liquidé des actifs. Il faut donc essayer de déterminer si ces opérations étaient pertinentes. Certains points positifs compensent certains points négatifs liés à un possible ralentissement économique, à savoir les hausses de taux, les avantages de ceux-ci pour les marges des banques, l’excellente situation actuelle du capital, ainsi que la croissance d’autres secteurs et l’importance qui leur est accordée.
Si l’on regroupe tous ces éléments, vu la position défensive de nos banques par rapport à d’autres banques à l’échelle mondiale, la vigueur de l’économie nationale par rapport aux autres, ainsi que la répartition relativement prudente et sensible aux taux d’intérêt du marché canadien, je pense que notre marché devrait encore dégager des résultats supérieurs. Cela dit, les rendements globaux semblent un peu faibles actuellement selon moi.
Comment structurez-vous votre portefeuille, compte tenu de l’incertitude liée à l’inflation et à la hausse des taux ?
Il va sans dire que ce sujet est d’actualité. Étant donné ce qui se passe dans le monde, les facteurs qui exercent des pressions sur, entre autres, les salaires, les chaînes logistiques et l’inflation perdurent. Les pressions sur les prix des marchandises et les perspectives s’y rattachant pourraient persister pendant un certain temps, compte tenu du rapport actuel entre l’offre et la demande.
Ainsi, nous nous efforçons toujours de maintenir un équilibre à l’égard des fonds à revenu, car l’une de nos plus grandes préoccupations est l’incidence négative de l’inflation sur les titres à revenu fixe. Nous avons donc toujours privilégié la croissance des flux de revenu. En ce qui concerne la composition de l’actif des fonds, nous cherchons aussi à trouver un bon équilibre entre les secteurs cycliques qui sont susceptibles d’offrir de bons rendements en contexte de hausse des taux.
C’est pourquoi nous avons toujours intégré des ressources, comme des matières, de l’engrais, de l’énergie, de l’or, etc. Les placements dans ces secteurs et l’établissement d’un tel équilibre ont toujours été au cœur de notre stratégie. Vu l’évolution du marché depuis le début de l’année, je dirais qu’il n’y a que des rendements donnés, mais que la pondération de ces secteurs a augmenté au sein du fonds lui-même, tout comme au sein des marchés.
Nous surveillons donc la situation attentivement. Il s’agit d’un avantage dans un tel contexte, mais nous sommes toujours à l’affût de signes qui indiqueraient que la situation va peut-être trop loin. Bref, cet équilibre global au sein du fonds est au cœur de notre stratégie.
Du point de vue des sociétés elles-mêmes, nous passons beaucoup de temps à étudier l’incidence de l’inflation sur celles-ci et leur capacité de face faire aux préoccupations liées à l’inflation et à transférer les fonds liés à l’inflation. De toute évidence, le pouvoir de fixation des prix est important. Il est difficile à obtenir, mais une certaine forme de pouvoir de fixation des prix au sein d’un secteur lui-même s’avère très utile.
Il est également important que les sociétés elles-mêmes soient concurrentielles. La capacité d’adaptation pour faire face aux tensions sur les chaînes d’approvisionnement est également de mise. Par conséquent, du point de vue des sociétés elles-mêmes et à partir de nos discutions avec celles-ci et les analystes, nous focalisons sur ces éléments et nous revoyons régulièrement nos scénarios.
Enfin, étant donné la persistance de l’inflation élevée, je pense que les bilans revêtent maintenant beaucoup plus d’importance. Ils ont toujours été importants, mais sont maintenant encore plus vitaux. Selon moi, nous privilégions de plus en plus les bilans prudents plutôt que le simple fait de produire des bilans qui correspondent à ce qui est attendu.
C’est donc une chose à l’égard de laquelle nous sommes favorables et qui nous préoccupe beaucoup lorsque, par exemple, une société qui éprouve actuellement des difficultés à produire un bilan a besoin de mobiliser des capitaux parce qu’elle s’inquiète de sa capacité à le faire si les marchés deviennent très volatils. C’est pourquoi cette prudence est donc au premier plan.
Finalement, compte tenu de la situation actuelle des marchés, nous avons augmenté les liquidités de nos fonds, en partie par prudence, mais surtout pour maintenir le tout face à la liquidation des actifs et à l’exagération de celle-ci sur le marché. Nous l’avons fait lorsque nous pouvions intervenir auprès des sociétés et que nous avions fait le calcul, comprenions comment le marché évoluera et pensions que le ratio risque-rendement serait beaucoup plus intéressant. Nous essayons donc de tirer parti de ces occasions.
Quelles sont vos prévisions concernant le secteur de l’énergie dans le contexte de mise en balance des préoccupations liées aux critères ESG et des facteurs relatifs à l’offre et à la demande ?
Voilà un sujet très controversé et très vaste. En ce qui concerne les critères ESG, je pense que nous... La façon dont les portefeuilles axés sur les critères ESG sont conçus les rend très prometteurs.
La méthode a changé. Nous avons en quelque sorte renoncé à éliminer ces mauvais joueurs et à priver les producteurs pétroliers de capital afin de nous concentrer davantage sur la transition, ce qui est très encourageant ! L’accent est maintenant mis sur le renforcement de l’intégration des critères ESG. Je pense que cette stratégie est utile, car elle ouvre la porte à un éventail de possibilités et permet à ceux qui le peuvent de financer le changement, d’établir des partenariats avec ceux qui en ont besoin et aussi d’obtenir d’excellents rendements. Ce qui est encourageant en ce qui a trait au secteur de l’énergie !
En ce qui concerne le contexte actuel du secteur de l’énergie, je ne veux pas créer de débat politique ou de controverses, mais l’acceptabilité sociale a de toute évidence été un obstacle pendant fort longtemps. Selon moi, vu les préoccupations à l’égard de l’offre qui ont découlé du conflit entre la Russie et l’Ukraine, il ne fait aucun doute que nous aurons besoin du secteur pétrolier et gazier pour un bon moment encore, alors que la transition vers des carburants à plus faible teneur en carbone se poursuit. La dépendance vis-à-vis cette offre est passée au premier plan.
De plus, nous en parlons très peu, mais nos producteurs d’énergie cherchent à réduire les émissions liées à leur propre production et s’en sortent très bien à l’échelle mondiale. Voilà de quoi être fiers ! Nous pouvons le constater de façon plus évidente à l’échelle mondiale compte tenu des exigences croissantes et des rapports sur les critères ESG, qui sont produits d’une façon normalisée et plus facile à comparer.
Les événements actuels mettent aussi en lumière l’excellente occasion pour le secteur canadien de l’énergie, qui est le quatrième producteur mondial de pétrole et de gaz, de se démarquer en tant que chef de file. D’un point de vue social, il y a réellement de quoi être fier de ce que notre pays a à offrir sur le plan notre culture et des ressources, qui sont abondantes et fiables.
De plus, nous avons la capacité, vu notre culture, de collaborer avec les autres. Il est très encourageant de voir nos grands producteurs collaborer, chercher à travailler ensemble et profiter du soutien de la communauté de la finance, ainsi que de voir notre gouvernement présenter des solutions de réduction des émissions carbone faisables et économiquement viables. Les partenariats entre l’ACCS et les États-Unis qui sont en train d’être mis en place en sont un excellent exemple.
Le dernier budget du Canada en fait état. Il a apporté à l’industrie les précisions tant attendues sur l’instauration d’un crédit d’impôt en ce qui a trait au captage d’émissions de carbone. Les sociétés savent maintenant mieux à quoi s’attendre en ce qui a trait aux rendements financiers et à ces projets et sont ainsi plus confiantes à aller de l’avant. Certaines choses doivent encore être mises en place pour que le tout fonctionne, mais c’est un pas dans la bonne direction et un signe très positif.
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