Dans la vidéo à ce sujet, Dagmara Fijalkowski, chef, Titres mondiaux à revenu fixe et devises, RBC Gestion mondiale d’actifs, souligne que les titres à revenu fixe conservent leur utilité dans le présent contexte de faiblesse des taux. Elle explique aussi en quoi la gestion active et la diversification mondiale peuvent bonifier les portefeuilles à revenu fixe.
Transcription
Quels sont les effets de la politique monétaire actuelle sur l’évolution des titres à revenu fixe ?
Nous sommes à un stade intéressant du cycle de la politique monétaire. Au cours de la période allant de la première hausse de taux d’intérêt de la Fed en décembre 2015 au mois de décembre dernier, la politique monétaire a été assez simple. La Fed relevait le taux des fonds fédéraux et réduisait la taille de son bilan. Sur une période d’environ trois ans, les taux d’intérêt ont connu une hausse assez appréciable de 225 points de base. Toutefois, la Fed a commencé à changer de discours vers la fin de l’année : elle a indiqué qu’elle serait flexible et patiente, tout en ajoutant qu’elle se penchait sur l’affaiblissement des données économiques et en tenait compte.
Le marché en a déduit que la prochaine mesure de la Fed consisterait à abaisser les taux. L’écart est donc grand entre les propos de la Fed, qui laissent croire à de futures hausses même si ses dirigeants semblent reconsidérer leur position, et le marché, qui intègre de plus de plus des réductions de taux d’intérêt. Nous sommes plutôt d’accord avec lui, mais il règne une grande incertitude. Nous adhérons à l’idée selon laquelle l’aplatissement de la courbe de rendement indique souvent que le cycle de durcissement de la politique monétaire a pris fin et que la Fed a procédé à sa dernière hausse. Sous cet angle, on peut naturellement s’attendre à ce qu’il y ait, après un temps d’arrêt plus ou moins long, des réductions de taux d’intérêt. Il ne s’agit pas d’un contexte défavorable aux titres à revenu fixe.
Comme les taux obligataires se maintiennent près de leurs plus faibles niveaux en 40 ans, est-ce encore utile d’investir dans des titres à revenu fixe ?
Cette préoccupation revient assez souvent chez les investisseurs. Les taux d’intérêt fléchissent constamment depuis 40 ans et comme ils se situent maintenant près de leurs creux de 40 ans, les investisseurs s’attendent souvent à ce que la situation s’inverse. Nous attribuons une probabilité assez faible à une telle perspective. Depuis que les taux d’intérêt ont touché un creux en 2012, les taux des obligations américaines à dix ans ont de fait évolué 95 % du temps dans une fourchette de négociation de 1,5 % à 3 %. Ils se sont donc maintenus dans une fourchette assez étroite autour du creux.
Il est bon de se rappeler que les taux d’intérêt sont descendus à ces faibles niveaux pour des raisons historiques et qu’ils peuvent s’y maintenir pendant des périodes prolongées. Parmi ces raisons, disons par exemple que les banques centrales ont poursuivi une politique de cible d’inflation et plutôt bien réussi à maîtriser l’inflation. Mentionnons en deuxième lieu la démographie, surtout dans les pays développés, où le vieillissement de la population se traduit aussi par un potentiel moindre de croissance et d’inflation. Il s’agit là d’une perspective historique, mais la perspective géographique a aussi son importance en matière de taux d’intérêt.
Ainsi, nous constatons que 20 % des obligations de l’indice global mondial d’obligations Barclays, surtout des obligations japonaises et européennes, sont assorties de taux négatifs. Toutefois, les investisseurs nord-américains qui détiennent ces titres avec couverture de change obtiennent en réalité un taux bien souvent supérieur à ceux qui investissent dans des obligations canadiennes ou américaines. Il en ira ainsi tant que les taux à long ou à court terme au Canada et aux États-Unis demeureront supérieurs aux taux des titres japonais ou européens, ce qui pourrait persister quelque temps.
Voici un autre exemple, qui réunit cette fois les perspectives historique et géographique, soit le Japon, où les taux des obligations à dix ans sont inférieurs à 2 % depuis 20 ans. Au cours de cette période, les investisseurs en obligations japonaises ont obtenu un rendement annuel global négatif une seule fois. Bien que le rôle des titres à revenu fixe dans les portefeuilles et la trajectoire future des taux d’intérêt ne cessent d’être remis en question, nous sommes donc d’avis que les titres à revenu fixe continueront de jouer un rôle important dans les portefeuilles des investisseurs tant que l’inflation demeurera maîtrisée.
Y a-t-il des possibilités de générer de l’alpha grâce à la gestion active des titres à revenu fixe ?
Fait intéressant, je pense qu’il y a actuellement plus de possibilités de générer de l’alpha dans le volet des titres à revenu fixe qu’au cours des 20 dernières années. Même si l’on n’analyse que la décennie qui a suivi la crise financière, on constate que l’envergure du marché des titres à revenu fixe s’est accrue. Au cours de cette période, l’encours des obligations mondiales d’État et de sociétés a augmenté de 60 000 milliards de dollars, soit le triple de la taille de l’économie américaine. Ce n’est pas le choix qui manque ! De plus, le nombre d’émetteurs de titres à revenu fixe mondiaux a doublé au cours de cette décennie pour dépasser la barre des 22 000. Il y a davantage de monnaies flottantes et librement négociables, et le coût de négociation des titres à revenu fixe et des monnaies a diminué. Il y a donc suffisamment de ressources. Nous pensons que les investisseurs actifs peuvent, avec l’aide d’une vaste équipe d’analystes, prendre des décisions importantes qui contribueront à la création de valeur ajoutée (alpha) dans les portefeuilles de titres à revenu fixe.