L’économie est en butte à un ensemble de difficultés susceptibles de freiner la reprise qui suivra la crise. Le virus s’avère plus difficile à maîtriser que nous ne l’avions prévu, de nouveaux variants font leur apparition et les restrictions se resserrent dans de nombreuses régions pour lutter contre l’augmentation du nombre d’infections. Pour ce qui est du vaccin, les retards sont fréquents et l’espoir d’un déploiement quasi parfait est balayé par la dure réalité d’une distribution plus lente que promise. Aussi, les craintes liées à l’inflation s’intensifient vu que la masse monétaire a explosé et que les prix commencent à augmenter dans certains secteurs de l’économie. Mais, tout bien considéré, nous nous attendons toujours à un solide rebond de la croissance économique en 2021 et nos prévisions demeurent supérieures à la moyenne (figure 1). Le rebond pourrait toutefois être moins spectaculaire que nous l’imaginions au départ.
Figure 1 : PIB réel moyen pondéré selon les prévisions générales
Prévisions de croissance des principaux pays développés
Nota : au 20 janvier 2021. Source : Consensus Economics
Néanmoins, il subsiste des raisons de nous montrer optimistes. Les livraisons de vaccins continuent et à mesure que la vaccination progressera, le nombre d’infections et de décès devrait diminuer. D’ailleurs, il pourrait déjà avoir son pic à l’échelle mondiale (figure 2). Sur le plan économique, le nouveau président des États-Unis, Joe Biden, a proposé un plan de relance de 1,9 billion de dollars américains dans lequel on prévoit le versement de prestations montant directement aux particuliers, ainsi que de l’aide pour les entreprises et les services de santé. L’impact de ces mesures musclées est amplifié par le maintien d’une politique monétaire extrêmement accommodante, dont des taux d’intérêt très bas et de vastes programmes d’achat d’obligations par les banques centrales. Sans sous-estimer les défis à court terme, nous croyons que l’économie redémarrera et, compte tenu de la profondeur de la contraction de 2020, nous pourrions n’être qu’aux balbutiements d’une longue période d’expansion.
Figure 2 : Cas de COVID-19 et décès causés par la COVID-19 dans le monde
"Nota : au 21 janvier 2021. Moyennes mobiles sur sept jours du nombre quotidien de nouveaux cas et de décès. Sources : OMS, Macrobond, RBC GMA
Signes d’un redressement économique
Divers signaux laissent croire que l’économie décolle et a déjà retrouvé le chemin de la croissance. Les indicateurs avancés de croissance s’orientent clairement vers une expansion et se situent près de leurs niveaux les plus élevés depuis 2018 (figure 3). Le secteur du logement, par exemple, se porte particulièrement bien, soutenu par la baisse des taux d’intérêt et l’engouement pour des espaces de vie plus grands dans un contexte de confinement. Les ventes de logements existants aux États-Unis ont augmenté de 22 % au cours de la dernière année, soit la plus forte hausse depuis la flambée qui avait suivi la crise financière de 2008-2009 (figure 4). Les prix des marchandises ont également bondi de façon significative. L’indice des prix au comptant du Commodity Research Bureau a grimpé de 32 % depuis mars 2020 et a atteint son plus haut niveau depuis 2014 (figure 5). Ces signaux indiquent que l’économie avance et que certains segments s’en sortent très bien.
Figure 3 : Indices mondiaux des directeurs d’achats
Nota : au 2 janvier 2021. Sources : Haver Analytics, RBC GMA
Figure 4 : Logement aux États-Unis - reventes de maisons
Total des reventes de maisons
Nota : au 22 janvier 2021. Source : National Association of Realtors
Figure 5 : Indice des marchandises du Commodity Research Bureau (CRB)
Marché au comptant américain des marchandises
Nota : au 22 janvier 2021. Sources : Reuters, Bloomberg, RBC GMA
Le marasme du marché du travail incite la Fed à maintenir de faibles taux
Même si l’économie globale semble repartir, le marché du travail américain est encore gravement perturbé par la pandémie et pourrait avoir besoin d’un soutien important pendant encore longtemps. Le nombre d’inscriptions au chômage a augmenté au cours des dernières semaines et continue de dépasser les pires résultats enregistrés pendant la crise financière il y a un peu plus de dix ans (figure 6). En raison de la gravité de la situation, la Réserve fédérale américaine (Fed) maintiendra probablement les taux d’intérêt extrêmement bas pendant de nombreuses années. En fait, les dernières projections du Comité fédéral de l’open market laissent entendre qu’aucune hausse des taux d’intérêt n’aura lieu d’ici 2023, ce qui semble cadrer avec ce que les marchés des contrats à terme prennent en compte (figure 7).
Figure 6 : Nouvelles demandes d’assurance-chômage aux États-Unis
Moyenne mobile sur quatre semaines
Nota : au 21 janvier 2021. Sources : BLS, Haver Analytics, Bloomberg
Figure 7 : Taux implicite des fonds fédéraux
Contrats à terme sur 12 mois
Nota : au 22 janvier 2021. Sources : Bloomberg, Réserve fédérale américaine, RBC GMA
Les taux obligataires augmentent
La Fed maintient les taux d’intérêt à court terme près de zéro, mais les taux des obligations à long terme ont augmenté parce que les investisseurs anticipent une reprise de la croissance économique et de l’inflation. Le taux de l’obligation du Trésor américain à 10 ans (la référence) a récemment monté au-dessus de 1,0 % pour la première fois depuis le début de 2020 et est maintenant de retour au-dessus de la limite inférieure de notre fourchette d’équilibre (figure 8). Malgré leur hausse récente, les obligations d’État comportent un risque d’évaluation élevé et, selon notre modèle, leurs taux seraient encore à des creux non viables.
Figure 8 : Taux des obligations du Trésor américain à dix ans
Fourchette d’équilibre
Nota : au 15 janvier 2021. Sources : RBC GMA, RBC MC
Les taux pourraient augmenter davantage si l’inflation dépassait les attentes
Il est probable que les taux augmenteront tranquillement pendant de nombreuses années, par contre, ils pourraient monter en flèche si l’inflation devenait plus vive que ce qu’on avait prévu initialement. Les points d’équilibre du taux d’inflation, qui représentent le taux auquel les obligations du Trésor et les obligations protégées contre l’inflation généreraient un rendement égal, donnent un aperçu des attentes des investisseurs en ce qui a trait à l’inflation. Ces points d’équilibre ont augmenté de façon importante au cours des derniers mois et sont maintenant plus élevés qu’avant la pandémie (figure 9). Le point d’équilibre du taux d’inflation à deux ans, de 2,48 %, a surpassé le point d’équilibre du taux d’inflation à dix ans, ce qui laisse croire que les investisseurs s’attendent à ce que l’inflation à court terme dépasse l’inflation à long terme. Ces attentes sont conformes au nouveau régime de ciblage de l’inflation de la Fed, aux termes duquel elle tolérera un taux d’inflation supérieur à 2 % pendant un certain temps. Si les prévisions du marché s’avéraient trop faibles et que l’inflation s’accélérait, les taux obligataires augmenteraient probablement.
Figure 9 : Point d’équilibre du taux d’inflation
Obligations du Trésor américain
Nota : au 22 janvier 2021. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Les marchés boursiers fracassent des records, à commencer par les actions de sociétés à petite capitalisation et les actions internationales
En début d’année, les actions mondiales ont continué sur leur lancée de 2020 et atteint de nouveaux records, portées par des politiques budgétaires et monétaires très favorables, et l’espoir que les campagnes de vaccination stimulent la croissance économique en 2021. L’indice S&P 500 a grimpé de 71 % par rapport à son creux de mars 2020 et se situe maintenant à plus d’un écart-type au-dessus de la juste valeur estimée par notre modèle (figure 10). D’autres segments de marché se sont négociés à des niveaux relativement attrayants, mais dans certaines régions, les valorisations ont fortement augmenté. Les actions des marchés émergents, par exemple, ont monté en flèche au cours des derniers mois et se situent à 83 % au-dessus de leur creux de mars 2020. Après avoir fait du surplace pendant plus d’une décennie, elles ont propulsé l’indice MSCI Marchés émergents au-dessus de son sommet historique de 2007. L’indice s’est rapproché de la limite supérieure de sa fourchette de juste valeur, alors qu’il se situait à près d’un écart-type en dessous en mars 2020 (figure 11).
Figure 10 : Point d’équilibre de l’indice S&P
Bénéfices et valorisations normalisés
Nota : au 15 janvier 2021. Les estimations de la juste valeur sont présentées à titre indicatif seulement. Des corrections sont toujours possibles et les valorisations ne limiteront pas le risque de dommages résultant de chocs systémiques. Il est impossible d’investir directement dans un indice non géré. Source : RBC GMA
Figure 11 : Point d’équilibre de l’indice MSCI Marchés émergents
Bénéfices et valorisations normalisés
Nota : au 15 janvier 2021. Les estimations de la juste valeur sont présentées à titre indicatif seulement. Des corrections sont toujours possibles et les valorisations ne limiteront pas le risque de dommages résultant de chocs systémiques. Il est impossible d’investir directement dans un indice non géré. Source : RBC GMA
Les actions de sociétés américaines à grande capitalisation ont dominé les marchés boursiers mondiaux pendant un certain temps et ont affiché des rendements supérieurs pendant la majeure partie de la pandémie. L’annonce par Pfizer des résultats positifs de son vaccin au début de novembre a entraîné un changement parmi les meneurs, les actions de sociétés à petite capitalisation et les actions internationales s’étant hissées en tête de peloton. La figure 12 présente les rendements en dollars américains d’un certain nombre d’indices majeurs, du 9 novembre 2020 au 22 janvier 2021. Les meilleurs rendements ont été dégagés par le S&P 600 et l’indice de sociétés à petite capitalisation Russell 2000, qui ont tous deux bondi de plus de 30 %. Les actions de sociétés à moyenne capitalisation et de marchés émergents ont pour leur part généré des gains de près de 20 %. Remarquez toutefois que le S&P 500 (grande capitalisation) et le S&P 100 (mégacapitalisation) ont affiché les pires rendements, ayant progressé de moins de 10 %. Ce changement dans les titres vedettes pourrait être un signe que les investisseurs s’attendent à une accélération de la croissance économique et à une augmentation généralisée des bénéfices des sociétés. Or, de telles améliorations profiteraient à un grand nombre d’entreprises, et non qu’à une poignée de sociétés de technologie à mégacapitalisation.
Figure 12 : Variation des cours des principaux indices en USD
Du 9 novembre 2020 au 22 janvier 2021
Nota : au 22 janvier 2021. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Les analystes s’attendent à ce que les bénéfices dépassent leur sommet de 2019 cette année
En fait, les bénéfices devraient augmenter assez rapidement en 2021, récupérant tout le terrain perdu en 2020 et même un peu plus. La figure 13 présente le bénéfice par action des 12 derniers mois du S&P 500, la partie ombragée du graphique représentant les prévisions générales des analystes. Le rebond prévu en 2021 porterait le bénéfice par action à 169 $ US, dépassant ainsi le sommet précédent de 165 $ US observé en 2019. Les bénéfices ont généralement surpassé les estimations ; il est donc possible que ce soit également le cas cette fois-ci (figure 14).
Figure 13 : Indice S&P 500
Bénéfice par action sur 12 mois
Nota : au 22 janvier 2021. Les estimations sont fondées sur les prévisions générales ascendantes des analystes sectoriels. Sources : Thomson Reuters, RBC GMA
Figure 14 : Sociétés qui ont déclaré des résultats supérieurs aux prévisions générales
Nota : au 22 janvier 2021. Source : Refinitiv
Les investisseurs sont extrêmement optimistes
La reprise attendue de l’économie et des bénéfices des sociétés ont restauré la confiance des investisseurs envers l’avenir. Les mesures ont toutefois atteint des niveaux d’optimisme élevés, ce qui peut être un signe de complaisance de la part des investisseurs. L’indice composite du pouls quotidien des investisseurs Ned Davis Research indique même un optimisme excessif (figure 15). Pour évaluer l’enthousiasme des investisseurs, on peut également surveiller le momentum des cours boursiers. Près de 90 % des actions inscrites à la Bourse de New York se négocient au-dessus de leur moyenne mobile sur 200 jours, ce qui laisse entrevoir une envolée exceptionnelle et généralisée des actions (figure 16). Ces indicateurs de confiance et de momentum sont généralement plus fiables lorsqu’il s’agit d’annoncer les creux du marché que les sommets. Toutefois, leurs niveaux nous paraissent exagérés et les marchés boursiers pourraient connaître un repli.
Figure 15 : Indice composite du pouls quotidien des investisseurs Ned Davis Research
Pourcentage d’optimistes
Nota : au 14 janvier 2021. Sources : Ned Davis Research, RBC GMA
Figure 16 : Indice composite de la New York Stock Exchange
% des actions qui se situent au-dessus de leur moyenne mobile sur 200 jours
Nota : au 15 janvier 2021. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Répartition de l’actif – nous restons d’avis que les actions continueront de surclasser les obligations
L’économie est confrontée à de nombreuses difficultés à court terme, mais au-delà des défis immédiats que pose la pandémie, nous entrevoyons une amélioration de l’économie, de faibles taux d’intérêt et une hausse des bénéfices des sociétés. Cette perspective optimiste à moyen et à long terme est renforcée par l’accentuation de la courbe des taux et par une flambée des actions qui s’étend aux actions de sociétés à petite capitalisation et aux actions internationales. Dans ce contexte, nous continuons de privilégier les actions par rapport aux obligations, car même une légère augmentation des taux par rapport aux faibles niveaux actuels entraînerait des pertes en capital qui effaceraient les revenus d’intérêt gagnés. Par conséquent, nous nous attendons à ce que les obligations d’État produisent des rendements faibles, voire négatifs, au cours de la prochaine année. Si l’économie se redresse et que les bénéfices des sociétés remontent comme prévu, les actions présentent alors un potentiel de rendement beaucoup plus élevé que les obligations, surtout dans les segments présentant des valorisations plus attrayantes que celles des sociétés américaines à large capitalisation. Qui plus est, même si les actions ont affiché une forte progression, elles offrent encore une prime de risque intéressante du point de vue historique par rapport aux titres à revenu fixe (figure 17). Par conséquent, nous conservons une surpondération en actions et une sous-pondération en obligations dans notre portefeuille de référence mondial équilibré. La répartition de l’actif recommandé par le Comité des stratégies de placement RBC GMA pour un portefeuille mondial équilibré est la suivante : 64,5 % d’actions (répartition stratégique « neutre » : 60 %) ; 34,5 % d’obligations (répartition stratégique « neutre » : 43 %) ; et le reste en liquidités.
Figure 17 : Ratio bénéfice/cours de l’indice S&P 500
Bénéfice des 12 derniers mois/niveau de l’indice
Nota : au 22 janvier 2021. Sources : RBC GMA, RBC MC
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