La Chine en quatre actes :
- Commerce entre la Chine et les États-Unis :
- Les négociations commerciales entre la Chine et les États-Unis s’annoncent prometteuses et un accord pourrait être conclu d’ici la fin mars ou en avril.
- Même si les négociateurs semblent avoir réalisé des progrès importants, ils ont encore du chemin à parcourir.
- Au départ, l’accord devait être une reprise de vieilles promesses : augmenter les achats de soya et de gaz naturel et baisser les tarifs douaniers sur les importations d’automobiles en Chine. Aujourd’hui, même des questions sous-jacentes semblent en voie d’être réglées, par exemple l’obligation pour les entreprises américaines de transférer leurs technologies à leurs coentrepreneurs chinois. La question de la propriété intellectuelle à elle seule représenterait 28 pages de l’accord.
- Si les États-Unis et la Chine parviennent à un accord, on s’attend à ce qu’ils reviennent sur leur troisième vague de tarifs bilatéraux de 10 % sur 200 G$ de produits. Une telle décision représenterait un dénouement important, même si le reste des tarifs douaniers demeurait en vigueur.
- En revanche, les États-Unis et la Chine pourraient continuer à nourrir des frictions à court terme sur des sujets autres que les tarifs douaniers, notamment en ciblant des entreprises bien précises. De plus, les différends entre les deux pays, par exemple sur le rôle des sociétés d’État chinoises, risquent de se poursuivre à long terme. Enfin, une baisse possible des tarifs douaniers entre les États-Unis et la Chine pourrait être compensée, plus tard, par une augmentation des tarifs sur les importations d’automobiles d’autres pays.
- Mesures de relance en Chine
- Depuis quelque temps déjà, la Chine met en place diverses mesures de relance monétaire et budgétaire afin de stabiliser la croissance.
- Les mesures budgétaires sont particulièrement difficiles à quantifier, en partie du fait que l’on continue d’en annoncer de manière parcimonieuse, mais aussi parce que ce type de mesures nous est étranger – elles mettent l’accent sur les baisses d’impôt plutôt que sur les infrastructures – et qu’il est difficile d’en évaluer l’importance avec exactitude.
- Pour illustrer ce dernier point, mentionnons que la Chine cible officiellement un déficit budgétaire correspondant à 2,8 % du PIB en 2019. Il s’agit d’une légère augmentation par rapport à 2018 (2,6 %), de 0,2 point de base attribuable aux mesures de relance budgétaire.
- Toutefois, l’analyse n’est pas aussi simple. Les emprunts hors bilan (par exemple, au moyen d’instruments de financement de gouvernements locaux) peuvent donner une image bien différente de la situation. En effet, selon certains spécialistes, la hausse du déficit attribuable aux mesures de relance budgétaire pourrait atteindre 2 pb, en plus de la hausse imputable aux mesures de relance monétaire.
- Si cette analyse est exacte, elle donne beaucoup plus de poids à l’interruption de la décélération de la croissance chinoise au second semestre de l’année.
- Statistiques en provenance de la Chine
- La Chine a récemment enregistré deux statistiques particulièrement favorables. Il s’agissait d’un heureux changement pour ce pays qui a surtout été confronté à des tendances négatives au cours des six derniers mois.
- Ainsi, l’indice PMI Caixin du secteur manufacturier chinois a effectué un redressement considérable et inattendu.
- Par ailleurs, le financement global de la Chine a atteint la somme record de 4,6 billions de renminbis en janvier.
- Cela dit, nous ne sommes toujours pas convaincus que l’économie chinoise a vraiment atteint un plancher. Les données sur le crédit ont pu être faussées en partie par le Nouvel An chinois ; par ailleurs, d’autres indices des directeurs d’achats chinois ne corroborent pas les résultats de l’indice Caixin du secteur manufacturier
- Cible de croissance de la Chine
- En raison de l’élément structurel du ralentissement de l’économie chinoise, les autorités de ce pays ont abaissé leur cible de croissance pour la prochaine année.
- Malgré toutes les mesures de relance budgétaire susmentionnées, la Chine ne vise qu’une croissance entre 6,0 % et 6,5 % pour la prochaine année. Il s’agit d’un recul par rapport à la cible de croissance de 6,5 % pour l’année précédente (et des cibles encore plus élevées des années antérieures).
- Notre prévision de croissance en 2019 s’établit à la limite inférieure de cette fourchette, à 6,0 %, en raison du ralentissement de l’économie mondiale, de la perte de compétitivité de la Chine, de la situation démographique défavorable du pays, du ralentissement de la mondialisation, de l’effet retardé des tarifs douaniers et des mesures de désendettement en Chine.
- En résumé, les plus récentes mesures de relance de la Chine ne devraient pas être complètement balayées du revers de la main. En fait, elles pourraient se révéler plus importantes encore que ce que laissent entrevoir les annonces officielles, mais les vents contraires ne manquent pas.
Quelques données positives :
- Dans un contexte de décélération économique généralisée, nous surveillons continuellement les premiers signes d’une stabilisation. Même si elles n’ont rien d’impressionnant, plusieurs données récentes livrent un message positif.
- Comme il a été mentionné plus tôt, la Chine a vu un de ses indices PMI et un indicateur de crédit remonter.
- Toujours sur les marchés émergents, l’indice PMI du secteur manufacturier indien continue de progresser.
- En outre, selon le plus récent livre beige des États-Unis, qui évalue les conditions économiques de manière anecdotique, 10 régions sur 12 ont enregistré une croissance légère ou modérée au cours de la dernière période, contre 8 pour la période précédente. Les secteurs de la fabrication et des services se seraient également redressés. Cela dit, plusieurs aspects indiquent que la fin imminente du cycle économique pose certaines difficultés : le marché de l’habitation, sensible aux taux d’intérêt, a commencé à piétiner, les pénuries de main-d’œuvre s’intensifient, les salaires sont en hausse et les marges subissent des pressions.
- Nous accordons beaucoup d’importance à la direction que prendront les prévisions générales de croissance mondiale. Comme on le sait, ces tendances demeurent baissières pour 2019, ce qui justifie nos prévisions de croissance inférieures à celles du marché. Toutefois, les prévisions générales pour 2020 se sont légèrement appréciées. Voilà une statistique à suivre. Jusqu’à présent, il s’agit d’une hausse négligeable : à peine 0,004 % sur un mois. En revanche, l’OCDE, un grand joueur sur le marché, a quant à elle abaissé ses prévisions de croissance mondiales pour 2019 et 2020. La nouvelle et fascinante direction des prévisions générales sera-t-elle un signe précurseur ou une simple agitation du marché ? Le temps nous le dira.
Autres points intéressants :
- PIB du Canada au T4 : Le PIB du Canada a stagné au T4 et n’a crû que de 0,4 % en chiffres annualisés. Il s’agit de son pire rendement depuis les incendies de forêt de Fort McMurray au T2 de 2016. La récente faiblesse est aussi en grande partie attribuable au secteur pétrolier qui a vu l’extraction de pétrole et de gaz chuter d’environ 8 %, selon les Services économiques RBC. Cependant, même sans cet important frein, la croissance du PIB n’aurait pas dépassé 1 %. C’est encore bien en deçà de la récente norme. Le ralentissement de l’économie canadienne ne nous surprend pas outre mesure. D’une part, nous anticipons depuis longtemps un recul au pays en raison des obstacles évidents que posent le pétrole, le logement et la compétitivité. D’autre part, notre propre indicateur avancé a reculé depuis un moment, laissant présager ce résultat. Le PIB du Canada a fléchi durant trois des quatre derniers mois. Il est maintenant plus susceptible de progresser que de chuter davantage, d’autant plus que le déclin du pétrole a déjà culminé. Nous continuons toutefois d’anticiper une croissance économique décevante, inférieure à la prévision générale.
- Banque du Canada : La dernière décision de la BdC relative aux taux reflétait la prudence. Elle tenait compte des dernières données peu encourageantes et des perspectives de croissance anémique au cours des prochains trimestres. La BdC n’a pas non plus fait référence au besoin d’un retour progressif à la neutralité pour le taux directeur. Le marché, réagissant à cette nouvelle, a donc fait passer la probabilité d’une hausse des taux au Canada d’ici juillet de 18 % à 0 % et celle d’une baisse des taux de 2 % à 21 %.
- BCE : La Banque centrale européenne a aussi adopté un ton conciliant, motivé par deux facteurs principaux :
- une cible de croissance réduite de 1,7 % à 1,1 % pour 2019 (actuellement à 1,25 %), et
- une projection actualisée d’un taux d’inflation de seulement 1,6 % en 2021 (soit toujours sous la cible de la BCE dans trois ans).
La BCE s’est ainsi engagée à ne pas relever les taux en 2019. Elle avait déjà fait cette promesse, mais seulement pour le premier semestre de l’année.
La banque a également introduit un programme qui injectera des liquidités dans le secteur bancaire européen dès cet automne. De manière plus globale, la BCE se trouve dans une position délicate puisqu’elle n’a jamais relevé son taux directeur, qui a atteint un plancher, ni réduit son bilan. Tout repli à venir sera par conséquent difficile à gérer.