Réflexion sur les droits de douane
Pour une vue d’ensemble des récentes secousses politiques aux États-Unis et de l’agitation des marchés, lisez l’article de notre chef des placements, Dan Chornous, ici : Composer avec la volatilité après le choc des politiques américaines.
Dernières nouvelles concernant les droits de douane
Il paraît impossible que la première annonce des droits de douane réciproques remonte à moins d’un mois. On dirait qu’une éternité s’est écoulée depuis ! Mais non, c’est juste une impression
Depuis le dernier numéro du MacroMémo, publié le 8 avril, une grande partie des droits de douane réciproques a fait l’objet d’un sursis de 90 jours – annoncé en grande pompe –, et la surtaxe de base résiduelle en vigueur « n’est plus que » de 10 %. En revanche, les droits de douane imposés par les États-Unis à la Chine ont grimpé jusqu’à 245 % à la fin d’avril, et cette dernière a largement riposté.
Direction prise ces dernières semaines
Malgré les fluctuations, la tendance de ces dernières semaines est clairement à la réduction des droits de douane. Les développements constructifs incluent les suivants :
Le sursis de 90 jours pour une grande partie des droits de douane réciproques.
Les exemptions de droits de douane pour certaines importations essentielles aux États-Unis, comme les produits électroniques.
Les rumeurs faisant état de certaines exemptions possibles dans le secteur de l’automobile.
Les déclarations favorables de la Maison-Blanche concernant la perspective d’un accord commercial avec Beijing, notamment à savoir que les droits de douane baisseraient substantiellement et que Donald Trump n’allait pas jouer les durs et serait très aimable envers la Chine. (La Chine, pour sa part, semble moins encline à négocier.)
Il semblerait donc que Washington ait fait un pas de recul, signalant les limites de sa volonté de tolérer les répercussions négatives des droits de douane sur l’économie et les marchés financiers. C’est particulièrement significatif, car cela laisse entendre que des droits de douane exorbitants ne seront probablement pas appliqués, ou du moins pas de manière indéfinie.
Rapport de force entre la Chine et les États-Unis
La guerre commerciale en cours oppose principalement deux mastodontes économiques : les États-Unis et la Chine. Si les États-Unis présentent certains avantages, notamment une économie plus importante et une influence considérable sur le système financier mondial, ils sont globalement plus vulnérables.
Le fait que les États-Unis imposent des droits de douane à la quasi-totalité de leurs partenaires commerciaux, alors que la Chine n’est en conflit qu’avec Washington, constitue une asymétrie clairement en faveur de Beijing.
Certes, le calcul n’est pas simple. Indéniablement, la Chine vend plus de produits aux États-Unis que l’inverse, de sorte que toute interruption de ce commerce nuit plus directement à la valeur ajoutée chinoise.
Il faut toutefois aussi prendre en considération l’envers de la médaille, c’est-à-dire que les entreprises et les consommateurs américains dépendent davantage des intrants chinois que le contraire. Le commerce est un jeu qui se joue à deux, et les deux parties doivent y trouver leur compte. En conséquence, lorsque le commerce est perturbé, les deux parties souffrent, même si les difficultés des États-Unis sont de second ordre, les ménages et les entreprises n’ayant pas accès à certains intrants essentiels.
Le fait que les États-Unis imposent des droits de douane à la quasi-totalité de leurs partenaires commerciaux, alors que la Chine n’est en conflit qu’avec Washington, constitue une asymétrie clairement en faveur de Beijing.
En outre, l’exposition du produit intérieur brut (PIB) de la Chine aux États-Unis est relativement faible. L’estimation conventionnelle selon laquelle 2,4 % des produits chinois sont achetés par des Américains est sous-évaluée. Elle omet les transbordements dans d’autres pays et les marchandises qui ont toujours bénéficié de l’exemption de minimis des États-Unis. Cela dit, même en tenant compte de tous ces facteurs, la Chine ne dépend des États-Unis que pour acheter environ 3,4 % de sa production (voir le graphique suivant).
Le PIB de la Chine est peu exposé aux États-Unis au travers du commerce mondial
La Chine profite d’une autre asymétrie au niveau sectoriel. Les États-Unis exportent surtout des produits substituables, comme des denrées agricoles. Par contre, la Chine a tendance à vendre des biens manufacturés différenciés, comme des produits électroniques. Il est donc relativement plus facile pour la Chine de trouver d’autres fournisseurs sur le marché international. En revanche, les États-Unis n’ont pas d’autres options à court terme pour se procurer certains biens manufacturés. Mentionnons notamment les panneaux solaires, les batteries, les téléphones, les ordinateurs, les moniteurs et les consoles de jeu.
À un niveau (beaucoup) plus précis, plus de 99 % des grille-pain, couvertures chauffantes et réveille-matin qu’on trouve aux États-Unis proviennent de la Chine. Il en va de même pour plus de 90 % des lampes à DEL et des parapluies, de même que pour une myriade d’autres produits.
Voici une autre façon de quantifier cette asymétrie : pour 36 % des produits que les États-Unis achètent à la Chine, ils dépendent de cette dernière pour plus de 70 % de leur approvisionnement. Par contre, seulement 10 % des produits que la Chine achète aux États-Unis proviennent principalement (>70 %) de ce pays.Cette liste inclut les avions, pour lesquels il semble possible de remplacer Boeing par Airbus, comme en témoigne la récente décision de Beijing de suspendre les livraisons de commandes d’appareils Boeing. Dans l’ensemble, les conséquences de la perte d’accès à l’autre pays sont donc nettement plus importantes pour les États-Unis.
La conclusion n’est pas que la Chine va sortir gagnante d’une guerre commerciale avec les États-Unis, mais qu’elle risque de perdre moins gros.
La Chine dispose également d’un levier commercial grâce à sa domination dans le domaine des terres rares et en ce qui a trait à certains minéraux critiques. De plus, les Chinois détiennent environ 761 milliards de dollars US de bons du Trésor américain et plusieurs centaines de milliards de dollars de titres adossés à des créances hypothécaires, dont la vente pourrait faire mal au marché obligataire des États-Unis.
Enfin, la Chine a l’avantage de pouvoir adopter une vision à long terme, en grande partie à cause de sa structure politique, mais aussi en raison de sa longue histoire, de la tolérance de ses citoyens face aux difficultés économiques et de son système de soutien aux industries clés susceptible d’aider celles-ci à rester viables en période d’instabilité.
La conclusion n’est pas que la Chine va sortir gagnante d’une guerre commerciale avec les États-Unis, mais qu’elle risque de perdre moins gros. La Chine a également la possibilité de renforcer son influence internationale à mesure que les États-Unis renoncent à leurs rôles traditionnels sur l’échiquier mondial.
Dans une certaine mesure, le reste du monde n’a que deux choix : s’allier aux États-Unis ou s’allier à la Chine. On s’attend à ce que les États-Unis insistent pour que les pays avec lesquels ils négocient des accords commerciaux limitent leur relation avec la Chine, tandis que la Chine a menacé d’imposer des droits de douane aux pays qui se plieraient à cette volonté des États-Unis. Les pays tenteront par tous les moyens de conserver l’accès aux deux marchés. Les obstacles seront les plus grands pour les pays asiatiques, car ils sont largement tributaires des échanges commerciaux, et ce, à la fois avec la Chine et les États-Unis.
Les difficultés ne sont pas terminées
Malgré une tendance générale à la réduction des droits de douane, plusieurs droits déjà annoncés entreront bientôt en vigueur et engendreront sur l’économie d’importantes répercussions négatives qui se manifesteront plus tard.
L’incertitude liée à la politique commerciale semble se dissiper, ce qui est un signe encourageant, mais elle reste très élevée et a théoriquement déjà causé des dommages économiques pour plusieurs mois, étant donné que les entreprises et les ménages hésitent à prendre des décisions importantes (voir le graphique suivant).
L’incertitude liée à la politique commerciale mondiale reste forte malgré la suspension pendant 90 jours des droits de douane réciproques propres à chaque pays
La Maison-Blanche a menacé d’imposer des droits de douane supplémentaires sur certains secteurs, comme la fabrication de composants électroniques, les produits forestiers, les produits pharmaceutiques et le cuivre. Le département du Commerce prévoit également imposer des droits de douane allant jusqu’à 3 521 % sur les panneaux solaires importés de quelques pays asiatiques en développement.
L’exemption de minimis sur les importations d’une valeur inférieure à 800 $ US sera annulée pour les produits chinois à compter du 2 mai, une décision qui touchera des importations totalisant des dizaines de milliards de dollars par an.
Les droits de douane sur les pièces automobiles doivent entrer en vigueur le 3 mai, un mois après ceux visant les véhicules automobiles.
L’application des droits de douane réciproques a simplement été repoussée de 90 jours et il est probable qu’une partie d’entre eux seront mis en œuvre en juillet.
La majeure partie des difficultés économiques découlant des droits de douane ne se manifestera pas immédiatement. Plusieurs facteurs expliquent ce décalage.
La renégociation de l’Accord États-Unis–Mexique–Canada (AEUMC) sera sans doute remise sur le tapis à un moment ou à un autre au cours des prochains trimestres, avec une réelle possibilité que les droits de douane ou du moins la menace de droits de douane soient utilisés pour inciter le Canada et le Mexique à rentrer dans le rang.
La majeure partie des difficultés économiques découlant des droits de douane ne se manifestera pas immédiatement. Plusieurs facteurs expliquent ce décalage, notamment ;
l’avancement des activités (nous y reviendrons)
les délais d’expédition (il s’écoule environ 8 semaines entre le moment où un produit quitte les usines chinoises et celui où il arrive dans les rayons des détaillants américains)
les stocks (selon le secteur, plusieurs mois pourraient être nécessaires pour écouler les stocks de produits bon marché constitués avant l’entrée en vigueur des droits de douane)
les contrats à prix fixe qui n’expireront pas avant quelque temps.
Cependant, on note un déclin marqué des expéditions de la Chine vers les États-Unis par rapport à l’an dernier, de l’ordre de 30 % à 50 % selon les dernières données. Cette chute peut donner une impression exagérée de l’impact, car un volume exceptionnellement élevé de marchandises a fait le même trajet au cours des semaines précédant l’entrée en vigueur des droits de douane, si bien que les besoins sont actuellement moindres. Il est aussi probable que les entreprises espèrent une diminution des droits de douane visant la Chine et attendent que ce soit le cas pour reprendre leurs achats. Toujours est-il que les dommages devraient être notables et commencer à se refléter dans les données économiques de mai et juin.
Avancement des activités en prévision des droits de douane
Certains signes indiquent que l’incertitude élevée entourant la politique pèse sur la demande. Cependant, cette dynamique sera en partie compensée par l’avancement de l’activité alors que les importateurs, les grossistes, les détaillants et les consommateurs cherchent à effectuer leurs achats avant l’imposition des droits de douane et les hausses de prix potentielles.
Du fait de son intégration transfrontalière importante, le secteur automobile est souvent cité en exemple pour les hausses de prix que pourraient entraîner les droits de douane ; les constructeurs automobiles ont prévenu que les taxes à l’importation pourraient faire monter les prix des véhicules neufs de plusieurs milliers de dollars. En mars, les ventes d’automobiles ont bondi de 13 % d’une année sur l’autre, les consommateurs cherchant à profiter des prix avant l’imposition des droits de douane. Selon le Livre beige de la Fed, « [traduction] la plupart des districts ont enregistré des ventes modérées à robustes de véhicules et de certains biens non durables, qu’on explique généralement par la volonté de faire ces achats avant les augmentations de prix liées aux droits de douane ».
Les données sur les échanges commerciaux font également état de l’avancement de l’activité. Les importations de biens de consommation aux États-Unis ont grimpé de 25 % d’une année sur l’autre en février (voir le graphique suivant). De plus, des pays comme la Chine et Taïwan ont enregistré une hausse sensible de leurs exportations. Selon la dernière enquête de l’ISM (Institute for Supply Management) sur le secteur manufacturier, l’augmentation des importations aux États-Unis s’explique par le fait que les acheteurs ont avancé des livraisons pour éviter les droits de douane. Les stocks augmentent également, puisque les entreprises avancent leurs achats de matériaux afin de minimiser l’incidence financière des droits de douane.
Les importations de biens de consommation aux États-Unis ont augmenté avant l’entrée en vigueur des droits de douane
Dans les dernières prévisions de bénéfices, l’avancement de l’activité est mentionné par les sociétés de divers secteurs, notamment les biens de consommation, les produits industriels, les produits pharmaceutiques, la technologie et la finance. Par exemple, Costco a constaté une augmentation des coûts liés à la chaîne d’approvisionnement au cours de son deuxième trimestre, car la société a accru ses stocks en prévision des droits de douane potentiels. 3M a déclaré qu’elle devait une bonne part de sa croissance enregistrée au premier trimestre à la Chine, les principaux comptes ayant augmenté leurs commandes en prévision des droits de douane. Plusieurs sociétés industrielles ont également mentionné des achats anticipés pour surmonter l’incidence des éventuels droits de douane ; les sociétés financières ont quant à elles indiqué que leurs clients utilisaient leurs marges de crédit pour financer une hausse de leurs stocks.
Heureusement, les chaînes d’approvisionnement semblent absorber cette augmentation de l’activité assez facilement. On note peu de pressions aussi fortes que durant la pandémie. L’indice des tensions dans la chaîne d’approvisionnement de la Réserve fédérale de New York a continué de signaler des conditions normales en mars (voir le graphique suivant). Les coûts du transport à l’échelle mondiale, y compris entre la Chine et les États-Unis, ne semblent pas refléter une augmentation de la demande. De plus, la légère augmentation de la demande de fret et des prix du transport routier observée au début de l’année semble s’atténuer.
Les chaînes d’approvisionnement mondiales montrent peu de signes de tension
L’avancement de l’activité économique pourrait faire monter les données sur la croissance à court terme, dans la mesure où la production a temporairement accéléré. Par contre, la croissance ralentira probablement par la suite, quand les entreprises commenceront à utiliser leurs stocks et que les achats anticipés des consommateurs et des entreprises créeront un vide dans la demande. Le rapport de l’ISM sur le secteur manufacturier a montré qu’après la hausse relevée au début de l’année, les nouvelles commandes sont maintenant en baisse. L’écart entre l’augmentation des stocks et la diminution des nouvelles commandes – un indicateur clé de la santé du secteur manufacturier – se situe actuellement à son pire niveau depuis la pandémie.
L’avancement des importations pourrait retarder la poussée d’inflation liée aux droits de douane jusqu’à ce que les vendeurs écoulent leurs stocks aux prix d’avant l’entrée en vigueur des droits. Par conséquent, les données quotidiennes sur les prix à la consommation commencent tout juste à refléter légèrement la hausse des prix à l’importation, même si les recettes douanières des États-Unis ont grimpé de 44 % d’une année sur l’autre au 24 avril. Évidemment, cette augmentation découle peut-être en partie de l’avancement de l’activité. Pour avoir une idée plus précise de la part de l’augmentation des recettes douanières qui est attribuable à celle des droits de douane effectifs, il faudra attendre de connaître les volumes réels des échanges commerciaux.
Négociations à venir
Les négociations entre les États-Unis et leurs partenaires commerciaux s’annoncent difficiles pour plusieurs raisons.
L’un des principaux problèmes est tout simplement leur ampleur considérable. Comment plus de 180 pays et territoires peuvent-ils espérer parvenir à un accord avec les États-Unis, et ce, en un peu plus de deux mois ? Il a fallu 14 mois pour que les États-Unis s’entendent avec le Canada et le Mexique lors du premier mandat du président Trump. Même avec les meilleures intentions du monde, la tâche semble irréalisable.
Dans le meilleur des cas, les droits de douane réciproques seront tout simplement retardés à nouveau. Dans le pire des cas, les droits de douane seront appliqués et causeront de réels dommages.
Mais le plus problématique est que personne ne sait ce que les États-Unis veulent vraiment obtenir de ces négociations. Certes, ils entendent réduire leur déficit commercial. Mais de quelle manière ? D’après les premières initiatives, offrir d’éliminer les barrières que constituent les droits de douane ne semble pas suffisant. Le fait que les exigences des États-Unis varient grandement d’une semaine à l’autre et que, dans certains cas, elles n’ont jamais été formulées de manière cohérente laisse penser que tout dépendra des caprices du président Trump.
On ne sait pas non plus avec quel interlocuteur les pays devraient entamer les négociations. Est-ce le département du Trésor ? Le département du Commerce ? Ou directement avec la Maison-Blanche ? Et peu importe la réponse à cette question, tout nouvel accord commercial devra être approuvé par le Congrès, à moins qu’il ne rétablisse la situation qui prévalait avant l’arrivée du gouvernement Trump.
Le Japon, la Corée du Sud, l’Inde et le Vietnam pourraient être les premiers pays à se lancer. En revanche, la Chine semble satisfaite de laisser les États-Unis dans l’expectative. Pourtant, comme les États-Unis ont intérêt à s’entendre avec elle, la situation pourrait être dénouée plus rapidement qu’avec les pays situés plus bas dans la liste de leurs priorités. Le Japon, la Corée du Sud et l’Inde semblent prêts à faire des concessions, comme augmenter leurs achats d’énergie et de produits agricoles américains.
Le Vietnam sous les projecteurs
Le Vietnam mérite une attention particulière, car il pourrait jouer le rôle d’indicateur sur l’issue des négociations. Le pays est non seulement fortement tributaire du commerce avec les États-Unis (plus de 25 % de sa production économique y est exportée), mais il applique l’un des taux de droits réciproques les plus élevés (46 %).
Le Vietnam est l’un des principaux fournisseurs de textiles, de meubles et de produits électroniques des États-Unis. Il s’est imposé comme site de fabrication de rechange, après que la Chine s’est vue imposer des droits de douane lors du premier mandat du président Trump. Plus de 60 % des téléphones Samsung dans le monde sont fabriqués au Vietnam. Le pays est également un fabricant de premier plan pour des marques telles que Nike, Adidas et Lululemon. Certains constructeurs automobiles japonais, dont Toyota, Honda et Mazda, commencent également à tirer parti de la puissance industrielle grandissante du pays.
La vulnérabilité du Vietnam aux droits de douane a motivé le pays à être particulièrement proactif pour négocier avec les États-Unis. Le secrétaire général du Parti communiste du Vietnam s’est entretenu avec le président Trump deux jours seulement après l’annonce des droits de douane réciproques, et le pays a proposé d’éliminer tous les droits de douane sur les importations américaines. Le secrétaire général souhaite également prendre des mesures pour empêcher que des marchandises chinoises traversent le Vietnam pour être réacheminées vers les États-Unis. En outre, une équipe de négociation est en cours de constitution pour continuer les pourparlers avec les États-Unis.
Le Vietnam est un cas intéressant, en raison de ses relations étroites avec la Chine. De fait, le président Xi s’est récemment rendu au Vietnam, et les deux pays ont signé 45 accords de coopération. Il s’agira donc d’un véritable test pour savoir dans quelle mesure un pays peut composer avec deux sphères d’influence à la fois.
À partir du moment où les États-Unis auront conclu un accord avec un pays, nous aurons une feuille de route essentielle pour comprendre les priorités de la Maison-Blanche et la voie à suivre, éventuellement, pour tous les autres pays.
Une politique axée sur les entreprises ?
Bien que les droits de douane puissent aider les États-Unis à se rapprocher de l’objectif de la Maison-Blanche, c’est-à-dire la revitalisation de l’activité industrielle, cette solution est loin d’être parfaite.
Le problème des droits de douane est que, d’un point de vue temporel, ils infligent un choc immédiat, alors qu’il est impossible pour la plupart des industries – même dans le meilleur des cas – de relocaliser leurs activités avant plusieurs années, voire beaucoup plus. Il leur faut construire des usines, former de la main-d’œuvre, mettre en place des chaînes logistiques, etc. En revanche, les consommateurs et les importateurs américains portent le fardeau des droits de douane pendant des années, tant qu’il n’y a pas de capacités de production suffisantes aux États-Unis.
Pour un président en deuxième mandat, un plan de relocalisation sur plusieurs années pose problème, car une grande partie de l’exécution interviendra après la fin du mandat présidentiel, alors que les priorités politiques peuvent changer sous l’administration du prochain dirigeant.
Dans ce contexte, une approche plus pragmatique serait d’exercer une forte pression politique sur les secteurs et les sociétés à titre individuel, en exigeant un engagement des entreprises à effectuer d’importantes dépenses de relocalisation aux États-Unis. Certaines de ces promesses ont déjà été faites, en particulier de la part des entreprises technologiques qui se sont engagées à investir plusieurs centaines de milliards de dollars à cette fin.
Nous ne disons pas que les droits de douane seront supplantés par une politique axée sur les entreprises, mais des droits de douane plus modestes associés à une pression plus forte sur les entreprises pourraient représenter une voie à suivre pour cette administration.
Logiquement, l’accent devrait être placé sur les secteurs manufacturiers, avec non seulement une pression pour qu’ils s’engagent à investir, mais aussi pour qu’ils mettent la main à la pâte, afin de s’assurer que les progrès réalisés pendant le mandat de Trump soient suffisants pour instaurer une confiance raisonnable dans le fait que l’investissement se poursuivra pendant les mandats suivants. Le secteur automobile représente un excellent test, car le protectionnisme américain qui existait déjà dans ce domaine en fait une cible plus réaliste et de plus grande valeur que beaucoup d’autres secteurs.
Nous ne disons pas que les droits de douane seront supplantés par une politique axée sur les entreprises, mais des droits de douane plus modestes associés à une pression plus forte sur les entreprises pourraient représenter une voie à suivre pour cette administration.
Hypothèses de base sur les droits de douane
Nos hypothèses de base n’ont pas radicalement changé au cours des dernières semaines. Toutefois, elles reflètent maintenant un peu plus de confiance étant donné les signes d’un penchant vers des tarifs légèrement plus bas au cours de la période considérée.
Nous supposons toujours que les droits de douane sur la Chine resteront élevés, mais qu’ils seront davantage de l’ordre de 50 %, au final, que du sommet actuel de 245 %.
Pour les autres pays, des taxes douanières de l’ordre de 10 à 15 % devraient prévaloir – les droits de douane de base de 10 % plus une poignée de taxes spécifiques aux secteurs. Mais nous ne pensons pas que les droits de douane réciproques seront appliqués à leur plein tarif pendant une longue période.
Selon nos calculs, un tel scénario n’entraînerait pas nécessairement une récession aux États-Unis ni dans d’autres pays, bien que les pronostics comportent toujours une part d’incertitude.
Ce point de vue peut sembler plus optimiste que les prévisions du marché, mais pas énormément.
Selon nos calculs, un tel scénario n’entraînerait pas nécessairement une récession aux États-Unis ni dans d’autres pays, bien que les pronostics comportent toujours une part d’incertitude. Les prévisions actuelles de croissance du PIB pour 2025 et 2026 sont les suivantes (voir le graphique suivant).
Croissance du PIB des pays développés prévue par RBC GMA
Le risque de récession est indéniablement plus élevé avec des droits de douane qu’en l’absence de droits de douane, et nous estimons à 40 % le risque de récession aux États-Unis au cours de l’année à venir.
Des dommages tarifaires plus importants par unité de tarif ?
Même si nous pensons que les droits de douane pourraient s’avérer un peu plus modestes que les prévisions consensuelles, le problème est qu’ils pourraient causer plus de dommages économiques par unité de droit de douane que ce que l’on suppose généralement. Ce point de vue fait contrepoids à notre optimisme.
Il faut non seulement tenir compte de l’effet direct de la hausse des prix à l’importation, qui réduit les revenus réels, et des barrières commerciales qui affectent la productivité, mais aussi des dommages causés par la forte incertitude, le boycottage et les distorsions dans les chaînes logistiques. En outre, le point de départ est loin d’être idéal :les déficits budgétaires sont importants (et limitent les mesures de relance budgétaire) et l’inflation est trop élevée (elle limite les mesures de relance monétaire).
Le boycottage se manifeste par une réduction substantielle de 25 % du nombre de traversées frontalières entre le Canada et les États-Unis, d’une année sur l’autre (voir le graphique suivant).
Le nombre de visiteurs en provenance du Canada aux États-Unis vient de chuter
En outre, nous pensons que les modèles économétriques qui tentent de déterminer les implications économiques des droits de douane pourraient sous-estimer les dommages directs. En effet, ces modèles ont été calibrés d’après les données des dernières décennies, qui se limitent pour l’essentiel à des droits de douane modestes et à des hausses et des baisses minimales.
Il est probable que des droits de douane de 20 % soient plus de dix fois plus dommageables que des droits de douane de 2 %. Un taux de 2 % serait à peine perceptible et ne susciterait qu’une réaction minimale de l’offre et de la demande. Par contre, un taux élevé peut complètement bouleverser un marché et une économie. Cette absence de linéarité n’est pas entièrement prise en compte dans les modèles conventionnels.
Du point de vue des marchés financiers, le multiplicateur normal entre un impact sur le PIB réel et l’impact équivalent sur les bénéfices des entreprises est de l’ordre de deux à trois. Ainsi, l’impact attendu de 1 à 2 points de pourcentage sur le PIB américain pourrait soustraire 2 à 6 points de pourcentage à la croissance des bénéfices des entreprises.
Mais étant donné que les droits de douane affectent essentiellement le commerce international et que les sociétés cotées en bourse sont les principaux fournisseurs de biens échangés, il n’est pas déraisonnable d’affirmer que le multiplicateur applicable aux bénéfices des sociétés, dans cette situation, pourrait être plutôt de deux à six fois l’impact sur le PIB réel. En utilisant ce multiplicateur approximatif, les bénéfices des entreprises pourraient donc perdre de 2 à 12 points de pourcentage de croissance.
En guise de consolation, les problèmes de la chaîne logistique, même s’ils peuvent revenir sous une forme ou l’autre, ne seront sans doute pas si aigus qu’au cours de la période 2020-2023, puisque l’incidence prépondérante des droits de douane est que la demande de biens, en particulier ceux importés et exportés, devrait diminuer. En conséquence, les ports, les entrepôts et le transport devraient subir une forte réduction de leur volume, laquelle ne sera que partiellement compensée par les embouteillages liés à l’évolution des préférences entre les marchandises et à de nouveaux schémas d’approvisionnement pour certains produits.
Révision à la baisse du choc inflationniste en dehors des États-Unis
Les droits de douane relèvent d’une nature inflationniste. Ils constituent en effet une taxe sur les importations qui est répercutée en grande partie sur les consommateurs au moyen d’une augmentation des prix. D’après un récent sondage réalisé par Wolfe Research auprès d’entreprises en contact avec les consommateurs, 75 % d’entre elles prévoient répercuter la totalité ou quasi-totalité de leurs surcoûts sur la clientèle. Par ailleurs,22 % prévoient en répercuter une partie.
Il se peut que l’amorce de l’inflation liée aux droits de douane commence à transparaître dans les données d’inflation en temps réel (voir la ligne bleue sur le graphique suivant). La série affirme que les prix pourraient connaître l’augmentation la plus rapide depuis plus d’un an en avril, et ce en dépit du fait que l’essence était moins chère ce mois-là.
L’indice quotidien de l’inflation aux États-Unis de PriceStats suggère une hausse de l’inflation due aux droits de douane
Compte tenu de toutes ces raisons et en dépit des conséquences très réelles sur l’inflation aux États-Unis – qui ont imposé la majorité des droits de douane – nous venons de revoir à la baisse l’effet inflationniste attendu sur les autres marchés.
Cette diminution de l’impact de l’inflation en dehors des États-Unis s’explique par une triple raison :
D’autres pays n’ont pas réagi de manière aussi ferme aux droits de douane américains que nous l’avions initialement prévu. La partie d’un droit de douane qui nuit à la croissance touche à la fois l’instigateur et la cible, mais la partie liée à l’inflation ne touche que l’instigateur, qui augmente ses propres prix en accroissant les coûts d’importation. Par conséquent, d’autres pays qui imposent des représailles plus modérées subissent un impact plus modéré sur leur inflation. Jusqu’à présent, la plupart des pays n’ont pris pratiquement aucune mesure en réponse aux droits de douane américains, mais nous pensons toujours qu’une réaction partielle se produira une fois que les droits de douane américains se seront stabilisés. Le fait est toutefois que l’effet inflationniste devrait être relativement plus faible pour la plupart des pays que pour les États-Unis, même en cas de maintien constant de l’impact économique.
L’affaiblissement en soi des économies en raison des droits de douane devrait signifier que le taux de chômage plus élevé et d’autres sources de capacités excédentaires font office de léger moteur déflationniste. Cela vaut tant pour les États-Unis que pour tout autre marché, mais cela devrait être plus visible dans les pays qui ne réagissent pas aux droits de douane au coup pour coup.
À mesure que les États-Unis fermeront leurs frontières au commerce, le reste du monde connaîtra une surabondance de certains produits. On pourrait imaginer que les pays se débarrassent de ces marchandises excédentaires, en faisant ainsi baisser les prix. Selon une estimation, les prix européens pourraient avoir baissé d’un demi-point de pourcentage par rapport à ce qu’ils seraient autrement de ce fait.
Nous admettons que les effets de dumping peuvent s’avérer une force primordiale, mais il convient de les relativiserD’une part, les produits chinois ont tendance à être différenciés. Les entreprises concernées ne se livrent pas nécessairement à une concurrence aussi féroce sur le plan des prix que dans certains secteurs. Elles pourraient donc faire preuve de plus de discipline que prévu, en choisissant de réduire la production pour maintenir ainsi les prix.
Une autre considération, encore plus importante, est que si certains secteurs peuvent avoir des surplus, d’autres connaîtront des pénuries, car les produits américains cesseront d’être disponibles sur les marchés internationaux. Les producteurs internationaux de ces secteurs seront en mesure d’augmenter les prix dans une plus large mesure qu’ils ne le feraient autrement, ce qui compensera théoriquement le dumping pratiqué dans d’autres secteurs.
Dans l’ensemble, le dumping devrait être légèrement plus important que la hausse des prix, étant donné que les États-Unis importent plus qu’ils n’exportent. Quoi qu’il en soit, toute déflation due au dumping devrait être relativement faible.
Dans l’ensemble toutefois, l’inflation internationale ne devrait pas connaître la même progression qu’aux États-Unis. Voici un exemple de calcul : alors que des droits de douane de 20 % qui plomberaient le PIB américain de 1,8 % entraîneraient une hausse des prix américains de 1,5 %, des droits de douane de 10 % réduiraient le PIB canadien de 1,8 % et entraîneraient une hausse des prix canadiens relativement plus faible de 0,9 % (voir le tableau suivant).
Scénarios de droits de douane
Pression sur la Réserve fédérale américaine et le président Powell
La conception étendue du pouvoir présidentiel du président Trump et son mépris des normes historiques ont trouvé un nouvel écho dans les récentes menaces de limogeage du président de la Réserve fédérale américaine, M. Powell. Malgré ses déclarations précédentes selon lesquelles M. Powell serait autorisé à achever le reste de son mandat de président, qui prend fin en mai 2026, M. Trump a accentué la pression sur le chef de la banque centrale en avril, déclarant que « la fin de son mandat n’arrivera jamais assez tôt ». M. Trump, qui a également reproché à M. Powell de ne pas avoir réduit les taux d’intérêt assez vite au cours de son premier mandat, a déclaré que M. Powell était « toujours en retard et se trompait ».
Sans surprise, les investisseurs n’ont pas apprécié cette immixtion politique dans la politique monétaire, l’indépendance de la banque centrale étant considérée comme un pilier de la stabilité financière. Le risque que des réductions de taux motivées par des desseins politiques n’alimentent l’inflation a fait grimper les taux des obligations à long terme, tandis que les actions et le dollar américain ont reculé. Ce renforcement du concept « vendre l’Amérique » a probablement contribué à faire revenir M. Trump sur ses menaces, affirmant désormais qu’il n’a pas l’intention de renvoyer M. Powell.
Quoi qu’il en soit, il se peut que les choses n’en restent pas là. Examinons donc si M. Trump a réellement le pouvoir de révoquer le président Powell. Un précédent survenu il y a 90 ans, qui protège les membres d’agences indépendantes contre le licenciement en cas de divergence politique (sans motif valable), fait actuellement l’objet de contestations devant les tribunaux après que M. Trump a destitué de hauts dirigeants de plusieurs autres organismes quasi gouvernementaux.
Cette affaire pourrait influer sur l’indépendance de la Réserve fédérale, mais même si ce précédent est abandonné, on peut penser que la cour pourrait accorder une protection spéciale au Conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale.
Il convient également de noter que le rôle de M. Powell en tant que président du Comité fédéral de l’open market (FOMC) – le groupe définissant la politique monétaire – est choisi par le comité même, et non par le président. Si M. Trump devait soustraire M. Powell à la présidence du Conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale, il se pourrait que celui-ci continue quand même d’y siéger en qualité de gouverneur pendant que son dossier suit son cours devant les tribunaux. En effet, son mandat sous-jacent de gouverneur n’expire pas avant 2028.
Des rumeurs veulent que, au lieu de révoquer M. Powell, M. Trump installe le remplaçant qu’il aura choisi au sein du FOMC pour agir à titre de « président fictif », et ainsi saper l’autorité de M. Powell pendant le reste de son mandat. Il n’y a toutefois pas de poste vacant au Conseil des gouverneurs jusqu’en janvier 2026. Le président n’est que l’un des douze membres avec droits de vote du FOMC.
En dépit des efforts d’atteinte de consensus de M. Powell qui ont contribué à réduire le nombre de dissidences contre les décisions politiques, les membres avec droits de vote du FOMC conservent la possibilité de briser les rangs avec le président (voir le graphique suivant). Le reste du comité pourrait même adopter un ton plus ferme qu’à l’accoutumée afin d’établir son indépendance
Toutefois, le congédiement d’autres membres du Conseil des gouverneurs dans le but d’altérer cette dynamique pourrait constituer un pas de trop. M. Trump n’a pas non plus le pouvoir de révoquer les présidents régionaux, qui détiennent cinq des douze voix au sein du FOMC.
Moins de cas de dissidences et un plus grand nombre de consensus ont été enregistrés à la Réserve fédérale sous la présidence de M. Powell
Il est intéressant de noter que le candidat pressenti pour remplacer M. Powell – l’ancien gouverneur de la Réserve fédérale, Kevin Warsh – n’a pas lui-même de personnalité conciliante. Il était considéré comme l’un des membres les plus bellicistes du FOMC durant son mandat de 2006 à 2011 et a critiqué le second cycle d’assouplissement quantitatif de la Réserve fédérale. M. Warsh soutient toutefois les politiques de M. Trump, et estime que les droits de douane auront une incidence limitée sur l’inflation, tandis que la déréglementation et les coupes budgétaires auront un effet désinflationniste. Il a néanmoins également qualifié les récentes réductions de taux de la Réserve fédérale de « contre-productives » et a affirmé que la Réserve fédérale devrait alléger son bilan pour juguler l’inflation.
À ce stade, et à la lumière du dernier refoulement du marché, M. Trump pourrait à présent choisir de laisser M. Powell terminer sa dernière année à la présidence du FOMC et faire de lui son bouc émissaire si l’économie ralentissait du fait des droits de douane. Cela représenterait tout de même une immixtion continue et malvenue dans l’indépendance de la banque centrale. Dans la foulée, les investisseurs pourraient exiger une prime de terme plus élevée sur les obligations du Trésor américain.
Craintes concernant les taux américains
Les droits de douane perturbent le marché des obligations du Trésor américain
L’annonce des droits de douane réciproques par le président Trump a entraîné des évolutions en dents de scie sur le marché des obligations du Trésor américain au début du mois d’avril. Les taux ont commencé par baisser, car les investisseurs avaient privilégié la sécurité relative des obligations d’État, en supposant que la Réserve fédérale abaisserait les taux d’intérêt pour compenser l’impact négatif de l’augmentation des droits à l’importation sur la croissance.
Toutefois, l’évolution s’est brutalement inversée la semaine suivante, les taux des obligations du Trésor américain à 10 et 30 ans ayant bondi de près d’un demi pour cent, soit leur plus forte hausse hebdomadaire depuis 2009. L’indice MOVE de la volatilité du marché des bons du Trésor a atteint un pic en 18 mois (voir le graphique suivant). D’autres marchés qui constituent la « plomberie » du système financier ont aussi connu des bouleversements inhabituels.
La volatilité du marché des titres du Trésor s’est accentuée au début du mois d’avril
Plusieurs facteurs semblent être à l’origine de la hausse des taux des titres du Trésor et de la volatilité accrue des marchés :
Pas d’« intervention de la Fed » : Son président, M. Powell, et ses collègues ont laissé entendre que la Fed n’était pas pressée d’abaisser les taux d’intérêt, car les droits de douane pourraient avoir une incidence persistante sur l’inflation et la banque centrale doit maintenir les anticipations d’inflation bien ancrées. L’empressement initial du marché à intégrer de nouvelles baisses de taux dans les prix semblait donc malavisé.
Positionnement des investisseurs : Les inquiétudes concernant les droits de douane réciproques ont entraîné une vente massive d’actions, l’indice S&P 500 étant presque entré en territoire « baissier » (recul de 20 % par rapport à son sommet). Les investisseurs qui souhaitent couvrir les pertes subies par leurs actions ou rééquilibrer leurs portefeuilles d’actifs multiples pourraient vendre leurs titres du Trésor, dont les rendements avaient été solides depuis le début de l’année.
Dénouement d’opérations avec effet de levier : Les fonds de couverture recourent à un effet de levier important (emprunts massifs) pour tirer parti des écarts de prix infimes qui existent sur les marchés des contrats à terme et des swaps portant sur les titres du Trésor, y compris la stratégie appelée « opération sur la base ». Toutefois, une volatilité accrue peut les contraindre à dénouer leurs positions et à vendre des titres du Trésor, ce qui crée un cercle vicieux dans lequel la volatilité et les ventes ne cessent d’augmenter.
Ventes effectuées par les investisseurs étrangers : Certains investisseurs sont de plus en plus mal à l’aise avec le marché américain compte tenu d’une grande incertitude sur le plan politique, d’une baisse de confiance dans le pays, des inquiétudes concernant les excès du pouvoir exécutif et le mépris de l’État de droit, ainsi que du risque de dommages sur l’économie et de poussée inflationniste. En particulier, l’afflux de capitaux vers les obligations d’État japonaises laisse penser que les grands investisseurs japonais, tels que les fonds de pension, ont vendu des titres du Trésor. Le Japon est le plus important investisseur étranger en titres du Trésor américain et détient 4 % du marché.
Bien que l’augmentation des taux ait été importante et que le fonctionnement du marché ait été mis à rude épreuve, cet accès de volatilité est demeuré mineur en comparaison avec les récents épisodes de tensions qui ont nécessité l’intervention des banques centrales. Lors de la crise des obligations d’État au Royaume-Uni en 2022, par exemple, le taux des obligations à 30 ans a augmenté de 150 points de base en quelques semaines avant que la Banque d’Angleterre n’intervienne. Quelques mois plus tard, la Fed a dû intervenir dans la crise bancaire régionale aux États-Unis, déclenchée en partie par une hausse de plus de deux points de pourcentage sur 12 mois des taux des titres du Trésor. Une crise plus grave des marchés financiers américains tout au début de la pandémie avait également contraint la Fed à acheter plus de 1 000 milliards de dollars de titres du Trésor en l’espace d’un mois.
Cette fois-ci, les commentaires des responsables de la Fed indiquant que la banque centrale se tenait prête à intervenir pour stabiliser le marché au besoin ont suffi à apaiser les craintes des investisseurs, qui restaient tendus même après la suspension des droits de douane réciproques par l’administration Trump.
Même si la tempête est passée, la santé du marché des titres du Trésor demeure préoccupante. Le dernier rapport de la Fed sur la stabilité financière a souligné que le niveau de liquidité était déjà faible par rapport aux normes historiques, et ce, avant même que la situation ne se détériore en avril. Les modifications apportées aux réglementations au lendemain de la crise financière afin de dissuader les banques de détenir des titres du Trésor pourraient inciter celles-ci à soutenir le marché durant les périodes de tensions. La limitation de l’effet de levier (qui se situerait entre 50 et 100 dans certaines opérations d’arbitrage) utilisé par les fonds spéculatifs pourrait également réduire l’incidence et la gravité de ventes massives de titres du Trésor qui se succéderaient en chaîne.
« Vendre l’Amérique » ?
Il y a eu des rumeurs selon lesquelles les investisseurs étrangers vendraient des titres du Trésor américain en représailles contre les politiques commerciales protectionnistes des États-Unis. Les investisseurs étrangers « officiels », tels que les banques centrales, les autorités sur le marché des changes et les fonds souverains, détenant 14 % des titres du Trésor en circulation, ils bénéficieraient certes d’un poids important. Toutefois, il n’y a pas eu de preuves suffisantes pour confirmer des ventes de titres en guise de représailles. Les ventes de titres détenus par des investisseurs étrangers officiels comme la Chine pourraient avoir été davantage motivées par la stabilité des taux de change, tandis que les ventes de titres par les investisseurs étrangers privés pourraient davantage s’expliquer par un repositionnement de leurs portefeuilles.
Cela dit, la chute des actions américaines et du dollar, conjuguée à la hausse des taux des titres du Trésor – deux facteurs qu’on observe plus souvent lorsque les marchés émergents subissent des tensions – laisse penser qu’il s’agissait d’opérations visant à « Vendre l’Amérique ». En effet, les investisseurs étrangers remettent de plus en plus en question la domination des États-Unis sur le plan économique et géopolitique.
Même s’il n’existe pas d’alternatives claires pour remplacer le dollar en tant que monnaie de réserve, les préoccupations concernant l’extraterritorialité financière – comme l’utilisation de sanctions contre les mauvais acteurs – ainsi que la réticence croissante de l’administration Trump à maintenir le rôle de chef de file d’après-guerre des États-Unis dans le système financier mondial, pourraient inciter les gestionnaires de réserves de change à continuer à se diversifier dans d’autres monnaies et dans l’or. Il y a dix ans, la part des titres du Trésor américain détenus par les investisseurs étrangers « officiels » avait déjà diminué, passant de plus de la moitié à un tiers du marché (voir le graphique suivant).
La part des titres du Trésor américain détenus par les investisseurs étrangers diminue
Certains responsables de l’administration Trump ont même envisagé l’idée que les pays « paient » les États-Unis au titre que le dollar américain est utilisé comme monnaie de réserve mondiale. Dans un certain sens, c’est déjà le cas puisque le « privilège exorbitant » qu’ont les États-Unis de fournir la monnaie de réserve mondiale est censé faire baisser les taux des titres du Trésor d’environ 0,5 %.
La part des titres du Trésor détenus par les investisseurs étrangers (et pas uniquement les investisseurs « officiels ») est passée de 50 % à 30 % au cours de la dernière décennie. Les investisseurs étrangers se sont montrés réticents à prendre le relais de la Fed, qui continue de réduire ses avoirs en titres du Trésor. Alors que la part détenue par la Fed culminait à 25 % il y a trois ans, elle ne représente aujourd’hui plus que 15 % du marché. Parallèlement à l’augmentation des émissions destinées à financer les déficits budgétaires persistants, ce resserrement quantitatif exerce une pression à la hausse sur la prime de terme, laquelle rémunère les investisseurs qui bloquent leur argent dans des titres du Trésor à plus long terme.
Selon la mesure de la Fed de New York, cette prime sur les obligations du Trésor américain à 10 ans a atteint 80 points de base en avril (voir le graphique suivant), son plus haut niveau en dix ans. Ce chiffre reste toutefois inférieur à la moyenne à long terme de 1,5 %. Une nouvelle hausse de cette prime exercerait une pression encore plus forte sur les finances publiques en raison de l’augmentation du coût du service de la dette. Elle rendrait également les emprunts plus coûteux pour les entreprises et les ménages qui reportent déjà leurs achats et leurs dépenses d’investissement compte tenu de l’incertitude liée aux droits de douane.
Le déséquilibre entre l’offre et la demande fait grimper la « prime de terme » des titres du Trésor
Constats d’après les données économiques en temps réel
Nous continuons à prêter une attention particulière aux données économiques en temps réel afin de déterminer quand et selon quelle ampleur les droits de douane nuiront à l’activité économique.
Les premiers effets des droits de douane commencent à peine à se faire sentir. En particulier, les recettes provenant des droits de douane aux États-Unis ont augmenté de 44 % depuis le début de l’année par rapport à l’année dernière. De plus, la majeure partie de cette hausse a été réalisée au cours du mois dernier (voir le graphique suivant). En contrepartie, ce sont bien sûr les importateurs qui paient ces droits de douane – les 43 milliards de dollars US de paiements totaux effectués jusqu’à présent sont extraits de l’économie. L’extraction finale devrait se situer dans les centaines de milliards de dollars pour 2025, à moins d’un revirement soudain et à grande échelle des droits de douane.
Hausse des recettes douanières aux États-Unis en 2025
Les prêts bancaires aux entreprises sont actuellement en forte hausse, ce qui est probablement aussi dû aux droits de douane, car les entreprises auraient utilisé leurs marges de crédit pour grossir leurs stocks avant que les droits de douane n’augmentent le coût de leurs intrants (voir le graphique suivant).
Augmentation du crédit aux États-Unis
La consommation en temps réel dans les secteurs des compagnies aériennes et de l’hébergement aux États-Unis est actuellement en baisse, probablement parce que les consommateurs prudents réduisent leurs achats discrétionnaires et les plus coûteux (voir le graphique suivant).
Dépenses quotidiennes globales par cartes aux États-Unis : compagnies aériennes et hébergement
Il convient toutefois de noter que les mesures plus générales de l’activité économique se maintiennent très bien jusqu’à la fin du mois d’avril. Dans l’ensemble, les dépenses par carte de crédit en temps réel continuent d’augmenter et se sont même accélérées (voir le graphique suivant), bien qu’une partie de ces dépenses reflète probablement l’anticipation de futures hausses de prix par les ménages.
Hausse continue des dépenses quotidiennes globales par cartes aux États-Unis
Par ailleurs, l’indice économique hebdomadaire de la Fed de Dallas continue d’afficher une légère tendance à la hausse (voir le graphique suivant. De plus, les demandes hebdomadaires de prestations d’assurance-emploi aux États-Unis restent faibles et stables (voir le graphique suivant). En d’autres termes, bien que nous puissions constater que les droits de douane commencent à se répercuter sur les données, ils ne sont pas encore apparents au niveau de l’économie dans son ensemble.
Poursuite de la tendance à la hausse de l’indice économique hebdomadaire de la Fed de Dallas
Les demandes de prestations d’assurance-emploi aux États-Unis indiquent toujours que tout va bien
Baisse des prix du pétrole
Le prix du baril de pétrole West Texas Intermediate est récemment passé de 70 dollars US à 64 dollars US. Cela représente une baisse d’environ 10 % du prix du pétrole (voir le graphique suivant).
Baisse des prix du pétrole brut
Qu’est-ce qui explique cette baisse ? Les trois forces les plus évidentes sont les suivantes :
Des prévisions de croissance économique mondiale plus faibles, ce qui laisse croire que la demande de pétrole pourrait également fléchir.
La possibilité que les discussions entre les États-Unis et l’Iran débouchent sur une augmentation de la production de pétrole iranien.
Une récente augmentation de la production de l’OPEP destinée à punir (par la baisse des prix du pétrole) et à ramener dans le droit chemin les membres et partenaires de l’ Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) qui ont dépassé leurs quotas de production.
Une baisse de 10 % du prix du pétrole pourrait faire croître le PIB américain de 0,2 à 0,5 % . Il s’agit d‘une hausse significative, mais loin d’être suffisante pour compenser les dommages causés par les droits de douane.
La baisse des prix du pétrole pourrait également faire diminuer l’inflation d’environ 0,4 % – ce qui est encore une fois très bienvenu, mais qui ne suffit pas à compenser le choc des prix dû aux droits de douane.
Et, bien entendu, les prix du pétrole doivent se maintenir à ces niveaux pour que les avantages économiques se fassent pleinement sentir. À court terme, il est possible que les prix du pétrole baissent encore, compte tenu d’un repli possible de l’économie et de la possibilité que l’OPEP prenne d’autres mesures à l’égard de ses partenaires qui ne respectent pas les règles.
À moyen terme cependant, il est plus probable que les prix du pétrole se redressent quelque peu, en partie en raison de la diminution de certains droits de douane et de dommages possiblement moins importants que prévu à l’économie internationale. En effet, un accord entre les États-Unis et l’Iran s’avère peu probable et les quotas de l’OPEP reviendront probablement à un niveau de production qui soutiendra un prix du pétrole plus élevé, plus proche des 80 dollars US le baril.
Élections canadiennes 2025
Résultats des élections
Le parti libéral a remporté une quatrième élection consécutive au Canada, et une troisième victoire minoritaire d’affilée. Mark Carney restera le premier ministre du pays.
Le dollar canadien a peu fluctué, ce qui signifie qu’il s’agissait du résultat le plus probable des élections – bien qu’il y ait eu une chance non négligeable d’une majorité libérale avant que le parti n’obtienne des résultats inférieurs aux attentes dans les banlieues de l’Ontario.
À l’aube de 2025, le thème de la campagne électorale devait initialement être celui du bouleversement. Cependant, il a évolué vers la recherche d’une solution sûre après que la Maison-Blanche a imposé des droits de douane au Canada et menacé la souveraineté de ce dernier. De son côté, le parti conservateur est passé d’une large avance dans les sondages au début de 2025 à une défaite électorale.
Le parti libéral a quant à lui réussi une autre de ses grandes transformations, avec un nouveau premier ministre apparemment bien adapté à la crise actuelle et des priorités politiques bien différentes de celles du parti dirigé par l’ancien premier ministre Trudeau il y a seulement quelques mois.
Par rapport à l’élection précédente, l’augmentation du soutien aux libéraux et le gain de sièges du parti sont relativement modestes. Ils s’expliquent davantage par la baisse du soutien au NPD, plus à gauche et, dans une moindre mesure, au Bloc québécois, que par la baisse du soutien au parti conservateur, qui forme l’opposition. En fait, le parti conservateur est en voie de remporter plus de sièges qu’aux dernières élections.
Gouvernement minoritaire
Le fait que les libéraux n’aient pas réussi à former un gouvernement majoritaire pourrait être lourd de conséquences.
Il est certain que les autres partis apporteront leur soutien si le conflit avec les États-Unis s’intensifie et qu’une aide financière ou d’autres mesures urgentes s’avèrent nécessaires.
Toutefois, ce gouvernement minoritaire pourrait être moins stable que lors des deux derniers mandats. L’une des raisons est que le NPD est moins un partenaire évident pour les libéraux qu’auparavant, car le Parti libéral se concentre actuellement sur des politiques de relance économique et le nouveau premier ministre présente une orientation plus centriste. La deuxième raison réside dans le fait que les deux partis réunis dépassent à peine le seuil des 172 sièges nécessaires pour détenir la majorité parlementaire (ensemble, ils détiennent 176 sièges).
Actuellement, le Bloc québécois occupe la troisième place pour le nombre de sièges, derrière le Parti conservateur ; il a parfois appuyé des gouvernements minoritaires dans le passé, mais généralement au cas par cas, plutôt que dans le cadre d’une politique constante. Il y a peut-être, sur certains enjeux, un terrain d’entente possible entre les libéraux et les conservateurs, étant donné des priorités politiques similaires – voir ci-dessous –, mais ce serait assez inhabituel.
Par ailleurs, si l’effet de nouveauté entourant Mark Carney s’estompe et que le NPD parvient à remonter dans les sondages au cours des prochaines années, le NPD pourrait être moins enclin à continuer de soutenir les libéraux, de sorte que la durée de vie du gouvernement pourrait s’en trouver écourtée. Mais le NPD devra d’abord se trouver un nouveau chef et remettre de l’ordre dans ses finances, et le Parti conservateur devra trouver une solution au fait que son propre chef a perdu son siège au Parlement.
Réflexions sur les politiques
Peu importe lequel des deux grands partis l’a emporté, un virage important dans l’orientation des politiques était déjà dans les cartes.
Alors que sous Trudeau, les politiques mettaient l’accent sur les enjeux sociaux, environnementaux et redistributifs, le prochain gouvernement allait nécessairement se concentrer davantage sur la politique économique.
Ce virage s’explique en partie par le contexte, en raison des menaces tarifaires, de la faiblesse de l’économie et du besoin urgent de stimuler la productivité. Mais il découle aussi du fait que d’un point de vue idéologique, les deux chefs de parti se situent plus à droite que Justin Trudeau ; sensiblement plus à droite dans le cas de M. Poilievre et modérément à droite dans le cas de M. Carney.
En effet, en surface, les partis libéral et conservateur ont promis un ensemble de politiques assez proches : baisses d’impôt, déréglementation, plus d’infrastructures, plus d’investissements dans les ressources, plus de dépenses militaires, plus de logements, moins d’immigration, levée de barrières au commerce interprovincial, et gestion habile de la guerre commerciale avec les États-Unis.
La version libérale de ces politiques, telle qu’elle a été choisie par les électeurs, n’est pas aussi audacieuse que la plateforme conservatrice sur plusieurs fronts. Le programme des libéraux comprend des baisses d’impôt relativement modestes (abandon de la hausse de l’impôt sur les gains en capital et légère diminution du taux d’imposition pour la tranche de revenu la plus basse), l’abolition partielle de la taxe carbone (pour les consommateurs, mais pas pour les grandes industries) et la simplification prudente des processus d’approbation pour les projets liés aux ressources naturelles.
Malgré tout, le programme libéral conserve une forte composante axée sur le développement national, avec des projets d’infrastructure majeurs comme le train à grande vitesse entre les villes de Windsor et Québec, ou l’expansion du port de Churchill, entre autres objectifs.
Il y a lieu de douter que le nouveau gouvernement réussisse à faire plus que doubler le rythme de construction de logements au pays, mais une certaine hausse semble probable. Toutefois, le programme des conservateurs en matière de logement n’avait pas plus de chances d’être mis en œuvre intégralement. Il semble que le nouveau gouvernement s’impliquera beaucoup plus dans la construction résidentielle dans l’avenir.
Les libéraux ont manifesté une position particulièrement combative sur les négociations commerciales avec les États-Unis, sous le mandat des deux derniers premiers ministres, comparativement à leurs pairs internationaux. Cette approche est récemment devenue plus modérée et marque peut-être un tournant important, la rhétorique enflammée de la campagne ayant cédé la place à des discussions plus prudentes, afin de ne pas s’attirer les foudres de la Maison-Blanche.
Les libéraux mettront encore l’accent sur les initiatives vertes, mais ils pencheront désormais plus pour la carotte (programmes incitatifs) que pour le bâton (taxes sur le carbone).
Dans leur programme, les libéraux ne font pas mystère de leur intention de continuer à cumuler des déficits. Cependant, ils établissent une distinction entre le budget de fonctionnement et le budget d’investissement du gouvernement fédéral. Cette approche permettrait d’équilibrer le budget de fonctionnement tout en continuant à dépenser plus dans l’ensemble par le truchement du budget d’investissement que ce que le gouvernement perçoit en recettes. Selon la méthode habituelle de comptabilisation, cela se traduit tout de même par un déficit, ce qui est néfaste sur le plan budgétaire, mais favorable sur le plan économique.
Les deux principaux partis ont proposé des économies de coûts et des gains de productivité irréalistes pour faire concorder leurs propositions budgétaires. Les objectifs de revenus sont donc discutables. Toutefois, il est clair que d’importantes dépenses budgétaires supplémentaires seront effectuées au cours des quatre prochaines années, notamment 22 milliards de dollars canadiens budgétisés pour les réductions d’impôts de la classe moyenne, 13 milliards pour payer l’annulation de la hausse du taux d’imposition des gains de capital, 18 milliards pour la défense, 24 milliards pour le logement, ainsi que 12 milliards pour les dépenses en infrastructures. En fait, les gouvernements minoritaires ont tendance à être plus coûteux que les gouvernements majoritaires, étant donné que le parti qui apporte son soutien – probablement le NPD – voudra obtenir des victoires politiques de son côté, probablement plus axées sur les politiques sociales.
Toutefois, la principale question qui se pose au Canada dans l’avenir immédiat concerne les droits de douane et, malheureusement, la voie à suivre sur ce front est sans doute davantage liée aux décisions de la Maison-Blanche américaine qu’à celles du Parlement canadien.
– Avec la collaboration de Josh Nye, de Vivien Lee, d’Aaron Ma et d’Ana Ardila
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