La propagation rapide du variant Delta met à rude épreuve les programmes de lutte contre la pandémie adoptés par les gouvernements du monde entier. Le nombre de cas augmente même dans les pays qui avaient réussi à maîtriser la situation ou dont une grande partie de la population est vaccinée. Les pays émergents, mal outillés pour faire face aux éclosions et où la vaccination tarde, sont la principale source de préoccupation des investisseurs. Dans ces régions, le taux d’infection ne diminuera peut-être pas avant que les campagnes de vaccination décollent ou qu’un certain niveau d’immunité collective soit atteint. La bonne nouvelle est que les vaccins s’avèrent efficaces pour prévenir les formes les plus graves de la maladie ; les hospitalisations et les décès n’augmentent donc pas proportionnellement au nombre de cas. Le Royaume-Uni a levé toutes les restrictions et d’autres pays lui emboîtent le pas en assouplissant les mesures liées à la COVID-19.
Les investisseurs redoutent également qu’après la profonde récession de l’an dernier, la période de reprise économique soit déjà au bout de sa course. La réduction des mesures de relance et le tassement de la demande accumulée pourraient comprimer davantage la croissance et l’inflation à l’avenir. Les indices des directeurs d’achats (PMI) ont déjà amorcé une baisse dans la plupart des grandes régions, signe que la croissance économique s’essouffle (figure 1). Ces indicateurs économiques avancés restent néanmoins solides en valeur absolue et annoncent encore une forte expansion. Même si les économistes s’attendent à ce que la croissance faiblisse en 2022 par rapport à 2021, les prévisions générales pour l’année prochaine demeurent bien supérieures à celles auxquelles nous sommes habitués depuis la fin de la crise financière (figure 2).
Figure 1 : Indices mondiaux des directeurs d’achats
Nota : Au 1er juillet 2021. Sources : Haver Analytics, RBC GMA
Figure 2 : PIB réel moyen pondéré, selon les prévisions générales
Prévisions de croissance des principaux pays développés
Nota : Au 19 juillet 2021. Source : Consensus Economics
L’inflation grimpe et la Fed fait preuve de patience
L’inflation pourrait culminer après que l’évolution des tendances de la demande, la perturbation des chaînes logistiques et les mesures de relance massives eurent contribué à une escalade des prix à la consommation au début de l’année. Certains biens et services figurant dans le panier de l’indice des prix à la consommation (IPC), comme les voitures d’occasion, ont connu des hausses de prix importantes, alors que de nombreuses autres composantes ont peu varié. Par ailleurs, les mesures qui cherchent à neutraliser l’effet des fluctuations extrêmes des prix ne pointent pas vers une inflation galopante (figure 3). La moyenne tronquée de l’inflation aux États-Unis, par exemple, mesure l’inflation de base en excluant les fluctuations de prix les plus fortes et les plus faibles dans le panier des consommateurs. Or, à 1,85 % selon le dernier relevé, cet indicateur est inférieur à la cible de 2,0 % de la Fed. Notons également que les prix de certaines marchandises, comme le cuivre et le bois d’œuvre, ont diminué au cours des dernières semaines, et que les frais d’expédition n’augmentent plus aussi rapidement qu’au début de l’année. Ce ralentissement des tendances pourrait signaler un recul de l’inflation à venir. En fait, les anticipations inflationnistes du marché ont déjà commencé à se tempérer (figure 4). Le président de la Réserve fédérale américaine, Jerome Powell, est d’avis que les pressions récentes sur les prix sont temporaires et que l’inflation redescendra à des niveaux plus raisonnables sans que la Fed ait à ajuster sa politique.
Figure 3 : Mesures de l’inflation aux États-Unis
Nota : Au 19 juillet 2021. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Figure 4 : Prime d’inflation implicite à long terme
Point d’équilibre du taux d’inflation : taux nominal par rapport aux obligations à rendement réel à dix ans
Nota : Au 19 juillet 2021. L’inflation de la zone euro est le point d’équilibre du taux d’inflation, pondéré en fonction du PIB, de l’Allemagne, de la France et de l’Italie. Sources : Bloomberg, RBC Marchés des Capitaux, RBC GMA
Les taux obligataires diminuent et le risque d’évaluation monte
L’idée selon laquelle l’inflation sera passagère, que la croissance ralentira et que le risque lié au virus remontera a fortement plombé les taux obligataires au dernier trimestre. Depuis son sommet de 1,75 % atteint à la fin de mars, le taux des obligations américaines à 10 ans a chuté de plus de 50 points de base à 1,20 %, son niveau le plus bas depuis février de cette année. Ce taux se situe maintenant bien en deçà du point d’équilibre estimé par notre modèle et pose un risque d’évaluation élevé (figure 5). Le marché obligataire semble refléter les craintes que l’optimisme suscité par la reprise économique ait été excessif. D’autres indices abondent dans le même sens, notamment l’aplatissement de la courbe des taux et la baisse des taux réels. En raison de ces variations, la capacité de la Fed à relever les taux d’intérêt au cours de ce cycle pourrait se révéler limitée.
Figure 5 : Taux des obligations du Trésor américain à dix ans
Fourchette d’équilibre
Nota : Au 19 juillet 2021. Sources : RBC GMA, RBC MC
Les marchés de crédit vacillent
Sur les marchés du crédit, l’écart de taux entre les obligations d’État et les obligations de sociétés, plus risquées, a atteint son plus haut niveau depuis mai. Bien que l’agrandissement des écarts puisse être de mauvais augure, le cycle de crédit actuel semble en être à ses débuts d’après la hausse des défaillances, sachant qu’en général, il s’écoule au moins cinq ans entre deux pics (figure 6). En effet, les excès se forment graduellement, il faut donc un certain temps avant qu’une nouvelle flambée de défaillances ne survienne. La diminution des écarts de taux par rapport aux niveaux actuels pourrait être limitée, surtout si les taux des obligations d’État continuent de baisser. Par contre, une augmentation soutenue serait étonnante à ce stade-ci du cycle.
Figure 6 : Écart de taux des obligations à rendement élevé
Nota : Au 16 juillet 2021. Sources : BofAML, Credit Suisse, RBC GMA
Les actions se maintiennent à des sommets records
De nombreux indices boursiers frôlent des records dans un contexte de faibles taux d’intérêt et de hausse des bénéfices des sociétés. L’indice S&P 500 a gagné 17 % depuis le début de l’année, les bénéfices étant de retour aux niveaux d’avant la pandémie et l’optimisme des investisseurs ayant tenu bon pendant tout le premier semestre de l’année. Près du quart des sociétés du S&P 500 ont annoncé leurs résultats pour le deuxième trimestre et dépassé les attentes dans 88 % des cas. La croissance des bénéfices a été forte, certes, mais les investisseurs paient un prix élevé pour en profiter. L’indice S&P 500 se négocie à plus d’un écart type au-dessus de la juste valeur établie par notre modèle. Il semble donc nécessaire de revoir les attentes de rendement à la baisse et reconnaître la vulnérabilité du marché en cas de détérioration des perspectives (figure 7).
Figure 7 : Fourchette d’équilibre de l’indice S&P 500
Bénéfices et valorisations normalisés
Nota : Les estimations de la juste valeur sont présentées à titre indicatif seulement. Des corrections sont toujours possibles et les valorisations ne limiteront pas le risque de dommages résultant de chocs systémiques. Il est impossible d’investir directement dans un indice non géré. Source : RBC GMA
L’analyse des tendances du marché boursier révèle une aversion pour le risque
Des signes montrent que les investisseurs deviennent plus prudents. L’optimisme qui a régné à la fin de 2020, après l’annonce des données encourageantes sur les essais des vaccins, est retombé depuis mai. Au cours des derniers mois, les actions de croissance ont surpassé les actions de valeur, les actions de sociétés à grande capitalisation ont dominé celles de sociétés à petite capitalisation, l’ampleur du marché a diminué et les actions internationales ont tiré de l’arrière sur les actions américaines (figures de 8 à 10). Toutes ces tendances indiquent que les investisseurs délaissent les segments du marché tributaires de la conjoncture économique ; elles annoncent peut-être aussi un ralentissement de l’économie.
Figure 8 : Rendement relatif des styles
Nota : Au 16 juillet 2021. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Figure 9 : Indice S&P 500
Indice équipondéré c. indice pondéré en fonction de la capitalisation boursière
Nota : Au 16 juillet 2021. Sources : Bloomberg, RBC GMA
Figure 10 : Indice MSCI Monde
Nota : Au 16 juillet 2021. Source : RBC GMA
Composition de l’actif – Baisse de la pondération des titres à revenu fixe, produit affecté aux liquidités
L’économie connaît une expansion rapide qui pourrait durer plusieurs années. À notre avis, dès que l’économie sera suffisamment solide pour résister aux hausses de taux, la Fed resserrera sa politique, entraînant éventuellement une progression des taux obligataires. Celle-ci pèserait sur les rendements totaux des titres à revenu fixe, et nous prévoyons que les rendements des obligations d’État seront faibles ou légèrement négatifs au cours de notre période prévisionnelle d’un an. Par conséquent, nous conservons une sous-pondération en obligations et avons profité de la récente baisse des taux pour réduire notre pondération en titres à revenu fixe d’un point de pourcentage. Les actions continuant d’offrir un fort potentiel de hausse, nous continuons de les surpondérer légèrement. Toutefois, nous reconnaissons que les valorisations sont élevées et que divers indicateurs incitent à la prudence. C’est pourquoi nous avons choisi d’affecter le produit de la vente d’obligations aux liquidités plutôt qu’aux actions. Nos recommandations actuelles de répartition de l’actif d’un portefeuille équilibré mondial sont les suivantes : 64,0 % en actions (pondération stratégique « neutre » de 60 %), 34,0 % en obligations (pondération stratégique « neutre » de 38 %) et 2,0 % en liquidités.
Soyez au fait des dernières perspectives de RBC Gestion mondiale d’actifs.